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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 35e Législature,
Volume 135, Numéro 20

Le jeudi 16 mai 1996
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 16 mai 1996

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Nouveau sénateur

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de vous informer que le greffier a reçu du registraire général du Canada le certificat établissant que Mme Jean B. Forest a été appelée au Sénat.

Présentation

Son Honneur le Président informe le Sénat qu'un sénateur attend à la porte pour être présenté.

L'honorable sénateur suivant est présenté, puis remet les brefs de Sa Majesté l'appelant au Sénat. Le sénateur, en présence du greffier, prête le serment prescrit et prend son siège.

L'honorable Jean B. Forest, d'Edmonton (Alberta), est présentée par l'honorable Joyce Fairbairn et l'honorable Nicholas William Taylor.

Son Honneur le Président informe le Sénat que l'honorable sénateur susmentionné a fait et signé la déclaration d'aptitude prescrite par la Loi constitutionnelle de 1867, en présence du greffier du Sénat, commissaire chargé de recevoir et d'attester cette déclaration.

(1410)

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, c'est un grand plaisir pour moi que de vous présenter notre nouveau collègue, le sénateur Jean Forest, d'Edmonton, en Alberta.

Madame le sénateur Forest a déménagé du Manitoba en Alberta en 1947, où elle a fait une contribution importante dans les domaines des affaires, de l'éducation et des droits de la personne. Elle contribue également à la vie communautaire de sa région et aux activités de son Église.

Madame le sénateur Forest est une ancienne enseignante. C'est son intérêt pour l'enseignement qui l'a amenée à se faire élire au conseil des écoles catholiques d'Edmonton, où elle a siégé durant plusieurs années avant d'en devenir présidente. Elle est ensuite devenue présidente de l'association provinciale. Elle a participé activement à la vie de l'Université de l'Alberta durant de longues années, ayant été membre de son Sénat et de son assemblée des gouverneurs. Elle en est maintenant la très respectée chancelière émérite. Elle a aussi présidé le Sénat du collège St. Stephen de l'Église unie, situé sur le campus de la même université.

Madame le sénateur Forest a aussi des états de service intéressants dans le domaine des droits de la personne, en Alberta. En 1974, elle a été membre de la première commission des droits de la personne de la province. En 1994, elle est devenue membre du comité d'examen des droits de la personne de l'Alberta. Au sein de son Église, madame le sénateur Forest a joué un rôle actif à l'échelle locale, régionale et nationale. Ancienne présidente du conseil des femmes du diocèse d'Edmonton, elle est actuellement vice-présidente de l'assemblée des gouverneurs du Newman Theological College.

Au fil des ans, madame le sénateur Forest a aussi été partenaire de l'entreprise familiale avec son mari, Rocky, pour diriger plus tard sa propre entreprise. Ensemble, son mari et elle ont élevé sept enfants.

On a souligné à maintes reprises les contributions de madame le sénateur Forest à la vie communautaire. Il y a trois ans, elle a été nommée présidente de l'Edmonton Community Foundation. Elle en est actuellement présidente honoraire, et, comme d'autres l'ont mentionné avant moi, elle est membre de l'Ordre du Canada.

Honorables sénateurs, madame le sénateur Jean Forest oeuvre aussi pour la cause de l'unité nationale. Nous nous sommes rencontrées avant d'entrer à la Chambre, et elle m'a alors rappelé que je l'avais déjà rencontrée à la fin des années 70, en sa qualité de membre du comité consultatif des ministres provinciaux chargé de la Constitution.

Je sais qu'avec des antécédents aussi variés, madame le sénateur Forest enrichira grandement les débats du Sénat. Je la félicite. Nous sommes heureux de l'accueillir parmi nous et de pouvoir travailler avec elle sur les enjeux importants qui attendent notre Parlement et notre pays.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai le plaisir de me joindre au leader du gouvernement pour souhaiter la bienvenue au sénateur Forest. Je sais que Mme Forest a satisfait aux exigences du premier ministre de sa province. Elle a déjà été élue au Sénat - de l'Université de l'Alberta. Peu après, elle a été élue représentante au Sénat par sa province. Elle est donc doublement qualifiée. Je suis ravi de l'accueillir.

Il y a controverse au sujet d'un Sénat élu et d'une réforme du Sénat. Un Sénat élu, on verra ça une autre fois. Pour l'instant, le choix des personnes qui vont siéger dans cet endroit incombe au premier ministre en exercice. Heureusement, ces choix, aussi controversés puissent-ils être sur le moment, s'avèrent généralement judicieux. La nomination du sénateur Forest le confirme.

Ce corps non élu réunit des talents, des compétences et des expériences qu'on ne trouve pas dans l'autre endroit - surtout à l'heure actuelle, me rappelle mon collègue le sénateur Murray. Les Canadiens qui s'interrogent, à juste titre, sur la composition du Sénat aujourd'hui devraient être rassurés de savoir que cet organe réunit un groupe unique de Canadiens dont ils ont motif d'être fiers. La nomination du sénateur Forest le confirme encore une fois. Je lui souhaite bonne chance dans ses nouvelles responsabilités.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, c'est un moment heureux pour moi. J'ai rencontré Jean Forest pour la première fois lorsque nous siégions à des conseils des écoles séparées, elle à Edmonton et moi à Calgary. Pendant beaucoup plus d'années que je ne voudrais, près de 40, nous nous sommes consultés sur de nombreuses questions. Avec le temps, nous avons eu l'occasion de comparer nos notes sur nos familles. Nous avons tous les deux de grandes familles.

J'aimerais faire savoir au chef de l'opposition que, en tant que libéral en Alberta, il faut souvent créer son propre électorat dans une circonscription. Moi, avec neuf enfants, et elle, avec sept, nous pouvions presque tenir un congrès ensemble.

Jean s'est beaucoup battue pour les droits des minorités. Je pense que le sénateur Kinsella sera particulièrement heureux de savoir qu'il a dans cette Chambre quelqu'un qui partage ses opinions. En plus d'être chancelière de l'université pendant quelques années, Jean Forest a siégé à la première Commission des droits de la personne de l'Alberta, en 1974, puis au comité consultatif des ministres sur la Constitution, en 1976, mais, surtout, au comité d'appel provincial sur l'éducation et également au groupe d'examen des droits de la personne de l'Alberta.

En lisant la biographie de Jean Forest, il est facile de se perdre dans les titres et les distinctions qu'elle a mérités, notamment l'Ordre du Canada et le titre de chancelière émérite de l'Université de l'Alberta.

Il est peut-être important surtout de se souvenir que Jean et son mari, Rocky, sont des défenseurs de la famille, les fiers parents de sept enfants et de 13 petits-enfants. J'aurais pu gagner la course pour la première génération de descendants, mais les petits-enfants de la famille Forest prennent trop d'avance. La famille Forest constitue l'un des groupes les plus intéressants et les plus amicaux que l'on puisse rencontrer en Alberta.

Je suis sûr qu'au cours des semaines et des mois à venir, les honorables sénateurs verront que Jean Forest est une participante de valeur. Ses idées sont toujours bien pensées, à-propos et exposées avec une grande compassion pour l'individu moyen.

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune d'une délégation de parlementaires du Mexique qui est ici pour la 10e réunion du Groupe interparlementaire Canada-Mexique. La délégation est dirigée par Son Excellence M. Fernando Ortiz Arana, président du Sénat des États-Unis du Mexique et coprésident de la délégation et par M. Augusto Gomez Villanuava, président du comité des affaires étrangères de la Chambre des députés des États-Unis du Mexique. Ils sont accompagnés par Son Excellence l'ambassadrice du Mexique au Canada.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Projet de loi sur l'Association canadienne des ex-parlementaires

La déclaration d'intention

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, pour une fois, j'étais d'accord avec le sénateur Lynch-Staunton quand il a critiqué la Chambre des communes de nous avoir fait parvenir le projet de loi C-275, qui est très lacunaire. Heureusement, les collègues du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ont corrigé certaines des pires erreurs et ils ont révisé le français, qui laissait gravement à désirer; cependant, ils n'ont pas nécessairement amélioré l'anglais.

À mon avis, le projet de loi lui-même, qui donne l'aval du Parlement à la création d'une Association canadienne des ex-parlementaires, qui existe déjà, était tout à fait inutile et il ne représente qu'une perte de temps pour nous tous. Cependant, j'étais le seul membre de la minorité. On m'a persuadé de ne pas user de mon privilège de refus de consentement et de laisser passer le projet de loi corrigé.

(1420)

Son Honneur le Président: Sénateur Gigantès, je regrette de vous interrompre. Vous parlez d'un projet de loi dont nous serons saisis prochainement ou qui fait déjà l'objet de discussions. Or, durant les déclarations des sénateurs...

Le sénateur Gigantès: Puis-je ajouter quelques mots? Je ne refuserai pas mon consentement.

[Français]

Le comité de la Régie interne, des budgets et de l'administration

Félicitations à son président

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, permettez-moi de prendre quelques instants pour souligner l'excellent travail accompli par le sénateur Kenny à la présidence du comité permanent de la régie interne du Sénat.

Nous avons remarqué chez lui une volonté d'améliorer les services aux sénateurs: la salle de lecture et les bureaux de travail aménagés derrière la Chambre du Sénat, la consolidation des budgets de bureau et de recherche, un plan stratégique de développement de la technologie en sont des exemples.

Nous avons aussi remarqué une volonté de réduire les dépenses par la voie de l'accroissement de l'efficience et l'impression des Débats du Sénat et de ses comités.

Je félicite donc le sénateur Kenny pour l'engagement démontré d'améliorer les services et de réduire les dépenses. En terminant, en juin 1995, j'ai soumis à son prédécesseur un rapport sur le gaspillage de papier. Ayant pu constater le travail accompli à ce jour par le président du comité de la régie interne, je suis confiant que des suites seront données à ce rapport.

Bravo et félicitations au sénateur Colin Kenny et aux membres du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration qui l'ont appuyé dans ses efforts.

[Traduction]

La Conférence mondiale des bénévoles de 1998

Sa tenue à Edmonton, en Alberta

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je tiens à porter à votre attention un événement qui aura lieu au Canada, plus précisément en Alberta, en 1998. Je suis persuadée que notre nouveau sénateur voudra y prendre part.

Cela me fait grand plaisir de vous faire part de la nouvelle qu'Edmonton, en Alberta, accueillera la Conférence mondiale des bénévoles de l'Association internationale pour l'effort volontaire ou IAVE. Ce sera la première fois que la Conférence mondiale des bénévoles se tiendra au Canada. Nous prévoyons que 1 500 délégués venus de plus d'une centaine de pays participeront à la conférence, qui aura lieu du 23 au 28 août 1998.

À la lumière de la soumission présentée par la Wild Rose Foundation, organisme gouvernemental financé par la loterie de l'Alberta, le conseil d'administration de l'IAVE a préféré l'Alberta à d'autres candidatures d'Europe, d'Amérique latine et de la Méditerranée.

Tous les deux ans, l'IAVE organise une conférence mondiale dans le but de réunir des bénévoles des quatre coins du globe. La conférence se veut un cadre où partager informations et ressources et offrir des possibilités de formation professionnelle qui n'existent pas à l'échelle mondiale. Elle est aussi l'occasion d'établir des relations entre bénévoles et dirigeants d'organismes bénévoles venus du monde entier.

En tant que Canadiens, nous pouvons à juste titre nous enorgueillir du fait que notre pays affiche un des taux de bénévolat les plus élevés au monde. Je vous demanderais de joindre vos voix à la mienne pour féliciter la Wild Rose Foundation pour ce qu'elle accomplit en matière de bénévolat en Alberta, au Canada et dans le monde, et pour le rôle qu'elle a joué, de concert avec l'Association canadienne des centres de bénévolat, dans l'acceptation de la candidature canadienne comme pays hôte de la conférence. Nous attendons avec impatience la tenue de cette conférence au Canada, au mois d'août 1998.

La Loi sur les langues officielles

Les observations concernant le rapport du commissaire

L'honorable Dalia Wood: Honorables sénateurs, je voudrais attirer votre attention sur le dernier rapport déposé par le commissaire aux langues officielles, M. Victor Goldbloom. Dans son rapport pour 1995, il mentionne que, dans la plupart des régions du Canada, la représentation des deux communautés linguistiques au sein des institutions fédérales relevant de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique reflète assez fidèlement leur proportion de la population dans ces régions, sauf au Québec.

En 1995, les anglophones représentaient 5,1 p. 100 des employés recrutés, ce qui est encore bien loin des 13,2 p. 100 qu'ils forment au sein de la société québécoise. Le rapport de 1995 n'enregistre aucun changement par rapport aux années 1991, 1992, 1993 et 1994.

Je voudrais demander au commissaire quand il va prendre des mesures pour régler ce problème. Voilà cinq ans qu'il se plaint du problème dans ses rapports, sans adopter pour autant des mesures concrètes en ce sens.

Quand se décidera-t-il à prendre des mesures pour corriger ce grave écart?


AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur l'Association canadienne des ex-parlementaires

Rapport du comité

L'honorable Sharon Carstairs, présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant:

Le jeudi 16 mai 1996

Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

 

SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-275, Loi constituant l'Association canadienne des ex-parlementaires, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 14 mai 1996, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les amendements suivants:

1. Page 1, article 2: dans la version anglaise, remplacer les lignes 13 à 15 par ce qui suit:

«who was, but is not at present, a member of the Senate or House of Commons of Canada;»

2. Page 1, article 2: dans la version française, remplacer les lignes 17 et 18 par ce qui suit:

«teur ou député au Parlement du Canada, mais qui n'est plus ni séna-»

3. Page 2, article 5: dans la version anglaise, remplacer les lignes 10 à 12 par ce qui suit:

«(d) to foster good relations between members of the Senate and House of Commons of Canada and former parliamentarians; and» .

4. Page 2, article 5: dans la version française, remplacer les lignes 12 et 13 par ce qui suit:

«ses entre les sénateurs et députés actuels et les ex-parlementaires;»

5. Page 3, article 7: supprimer les lignes 10 à 13 et changer la désignation littérale des alinéas i) à k) et les renvois qui y sont faits.

Respectueusement soumis,

La présidente,
SHARON CARSTAIRS

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Carstairs: Plus tard aujourd'hui, avec la permission du Sénat.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est inscrit à l'ordre du jour plus tard aujourd'hui.)

Régie interne, budgets et administration

Présentation du cinquième rapport du comité

L'honorable Colin Kenny, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 16 mai 1996

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

CINQUIÈME RAPPORT

Votre comité désire informer le Sénat que le président et le vice-président ont approuvé les fonds d'urgence ci-après destinés aux comités du Sénat, conformément à la règle 3:03 des Directives régissant le financement des comités du Sénat:
Banques et commerce (5 avril 1996) 10 000 $
Énergie, environnement et ressources naturelles (16 avril 1996) 10 000 $
Affaires étrangères ( 14 mai 1996) 10 000 $
Affaires juridiques et constitutionnelles (5 avril 1996) 10 000 $
Examen de la réglementation (mixte) (14 mai 1996) 10 000 $
Affaires sociales, sciences et technologie (5 avril 1996) 10 000 $
Transports et communications (29 mars 1996) 5 000 $
Total 65 000 $

Votre comité signale qu'il entreprendra son examen de tous les budgets des comités pour l'année financière 1996-1997 le mardi 28 mai 1996.

Respectueusement soumis,

Le président,
COLIN KENNY

Son Honneur le Président: Quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Kenny, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi sur l'assurance-emploi

Attribution de temps pour le débat

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, il y a eu des discussions entre les leaders des deux côtés au sujet du projet de loi C-12. Ainsi, conformément à l'article 38 du Règlement du Sénat, je propose:

Qu'au plus tard le vendredi 31 mai 1996 à 16 h 00, les délibérations du Sénat soient interrompues et que toutes questions nécessaires pour que le projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada, franchisse l'étape de deuxième lecture soient posées sans autre délibération ou amendement, et qu'aucun vote relativement à ces questions ne soit reporté.

(1430)

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

La Loi électorale du Canada

Projet de loi modificatif-Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-243, Loi modifiant la Loi électorale du Canada.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Taylor, la deuxième lecture du projet de loi est inscrit à l'ordre du jour de la séance du mardi 21 mai 1996.)

Le Sénat et la Chambre des communes

Avis de motion-Le traitement des projets de loi d'intérêt public du Sénat-Le message destiné aux Communes

L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 28 mai 1996, je proposerai:

Qu'un message soit envoyé à la Chambre des communes exprimant la préoccupation du Sénat à l'égard du traitement réservé par la Chambre des communes aux projets de loi d'intérêt public du Sénat.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les Pêches

Malpeque, dans l'Île-du-Prince-Édouard-La disponibilité des fonds pour éventualités pour aider les pêcheurs de homard-La position du gouvernement

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le port de Malpeque, qui se trouve sur la côte nord de l'Île-du-Prince-Édouard et qui est le port d'attache d'une cinquantaine de homardiers, est actuellement bloqué par une barre de sable. Je ferai remarquer aux honorables sénateurs que ces 50 bateaux sont autorisés à pêcher le homard seulement pendant les mois de mai et de juin. Cette activité est la principale source de revenus des habitants.

Le ministre des Pêches et des Océans et ses fonctionnaires affirment qu'il n'y a pas d'argent pour le dragage du port. Le leader du gouvernement au Sénat sait aussi bien que moi que le ministère dispose de fonds pour éventualités qui peuvent servir dans de tels cas.

Madame le leader pourrait-elle utiliser son charme, son expérience et sa ténacité considérables pour intervenir auprès du ministre des Pêches et des Océans afin de le persuader d'affecter le maigre financement nécessaire pour libérer l'entrée du port et aider ainsi les pêcheurs, qui doivent déjà faire face à des prises réduites et à une baisse du prix de leurs produits?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il s'agit là d'un appel irrésistible. Je promets à mon honorable ami que je me servirai de toutes les qualités qu'il m'a attribuées, qu'elles soient réelles ou fictives, pour intervenir auprès de mon collègue le ministre des Pêches et des Océans.

L'honorable sénateur a fait allusion à des fonds pour éventualités. Je ne sais pas au juste si ces fonds peuvent être utilisés dans ce cas. De temps à autre, les provinces peuvent aider à mettre en oeuvre des ententes de financement conjoint en cas d'urgence.

Je porterai la question de mon honorable ami à l'attention du ministre pour voir ce qui peut être fait.

L'Environnement

Malpeque, dans l'Île-du-Prince-Édouard-Le retard dans l'enlèvement du sable bloquant le port-La position du gouvernement

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, le deuxième prétexte invoqué par le ministère des Pêches et des Océans est qu'il faudra de trois à six mois pour obtenir l'autorisation environnementale d'enlever le sable. C'est du plus haut ridicule. Ce sable vient de l'une des plus belles plages qui soient, à quelques milles de là. Ce retard me semble injustifiable.

La ministre voudra peut-être rappeler au ministre de l'Environnement que le sable n'est pas contaminé. Il se déplace constamment autour de l'île. Si les gens de l'Environnement pouvaient accélérer l'approbation, le ministère des Pêches et des Océans pourrait peut-être se montrer plus coopératif.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je vais transmettre le point de vue du sénateur au ministre de l'Environnement.

La Justice

L'enquête sur la vente des avions Airbus à Air Canada- La prolongation du délai pour déposer la défense dans l'action en diffamation-L'effet sur le demandeur du retard qui en résulte-La position du gouvernement

L'honorable Richard J. Doyle: Honorables sénateurs, tout comme le sénateur Phillips, je m'adresse au leader du gouvernement au Sénat, en quête de sagesse et de réassurance.

Ma question porte sur l'argumentation des avocats du gouvernement qui essaient de faire échec à la poursuite pour diffamation intentée par Brian Mulroney dans l'affaire Airbus. L'un des avocats du gouvernement fédéral, agissant au nom de la GRC, a avoué cette semaine que la fuite au sujet des accusations du gouvernement contre l'ancien premier ministre a été, sur le plan humain, très contrariante. Des excuses ont été faites.

Madame le leader du gouvernement déduit-elle de cette approche que le ministère suppose que, drame mis à part, il est tout à fait normal que le gouvernement poursuive un citoyen pendant un, deux ou dix ans sans motifs, sinon l'espoir d'accumuler assez de preuves pour porter des accusations?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je prends note des observations du sénateur Doyle au sujet des rapports d'un des avocats dans cette affaire. Je dois répéter au sénateur ce que j'ai dit à maintes reprises, soit que, au coeur de cette affaire dont un tribunal est maintenant saisi à Montréal se trouve une enquête policière à laquelle ni le gouvernement, ni aucun ministre n'ont été mêlés. Ils ne connaissent pas non plus la substance de cette enquête. C'est ce que je dis au Sénat depuis un certain temps, et c'est ce que je vais continuer de répéter.

(1440)

Les activités dont nous avons discuté assez longuement hier, à propos de la demande du commissaire de la GRC qui veut obtenir une prolongation des audiences, sont bien connues. Je n'ai rien d'autre à ajouter à l'intention de l'honorable sénateur.

Le sénateur Doyle: Comme question complémentaire, honorables sénateurs, je demanderai à madame le leader du gouvernement au Sénat si elle ne trouve pas que M. Mulroney se trouve dans une situation aussi lamentable que les pêcheurs de la côte est? Quelque chose empêche qu'on lui rende justice et cet obstacle doit être supprimé. La ministre croit-elle qu'une personne qui a fait l'objet de telles accusations peut espérer le moindrement voir sa réputation ou même son innocence rétablie?

Le sénateur Fairbairn: Je comprends la préoccupation de mon collègue, mais je ne peux pas répondre à sa question. Le procès à Montréal se poursuit et l'enquête, qui est une chose tout à fait différente, se poursuit elle aussi. Je ne peux pas donner à mon collègue mon opinion personnelle sur cette affaire.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, nous ne demandons pas au sénateur Fairbairn de nous donner son opinion personnelle. Nous lui demandons de reconnaître que le gouvernement fédéral fait partie intégrante de l'enquête et que le gouvernement fédéral est allé demander au tribunal d'interrompre certaines poursuites afin que l'enquête puisse se poursuivre.

Le sénateur Fairbairn vient de dire que l'enquête policière ne se trouve pas au coeur de l'affaire. Ce sont ses propres paroles.

Honorables sénateurs, il y a deux choses distinctes ici. Il y a une enquête policière qui dure depuis Dieu sait combien de temps et il y a un citoyen canadien qui demande que soit rétablie sa réputation, qui a été ternie, d'après lui, par le gouvernement du Canada.

Ma question est la même que celle que j'ai posée il y a deux jours et encore hier. Comment le gouvernement fédéral peut-il se dissocier de l'enquête policière et prétendre et même laisser entendre que cette enquête est entre les mains de la police, alors que nous savons tous que ce qui a suscité cette enquête est une information que, de son propre aveu, le ministre de la Justice a reçue l'automne dernier et qu'il a alors transmise au solliciteur général? À l'époque, le ministre de la Justice avait dit qu'il avait reçu une certaine information qui concernait certaines personnes et qu'il considérait suffisamment importante pour la transmettre.

Le gouvernement fédéral est mêlé depuis le début à toute cette enquête et à toute cette affaire. Pourquoi persister à prétendre que toute cette enquête est menée par la police, est entre les mains de la police, et que vous n'avez rien à voir dans cette affaire, d'autant plus que ce sont l'avocat de la GRC, l'avocat du procureur général et Mme Kimberley Prost qui ont demandé ensemble aux tribunaux de retarder le procès intenté par M. Mulroney? S'ils ont demandé cela ensemble, c'est qu'ils ont tous un intérêt dans l'enquête et dans le procès. Pourquoi essayer de dissocier des choses qui sont liées depuis le départ?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, il est évident que mon honorable collègue a sa propre opinion sur cette question, mais, sauf le respect que je lui dois, je ne partage pas son avis, surtout lorsqu'il dit que le gouvernement du Canada doit reconnaître qu'il est partie à l'enquête et que nous ne devons pas essayer de nous dissocier de celle-ci. Je dois dire à mon honorable collègue, en toute sincérité, je le répète, que les ministres dont il parle ne sont pas partie à l'enquête. Ils n'ont pas participé à l'enquête. Ils ne connaissent pas la teneur de l'enquête. Si mon honorable collègue revient au début de cette affaire, comme il l'a dit aujourd'hui, il constatera que le ministre de la Justice et procureur général a déclaré au tout début que les informations qu'il peut avoir transmises n'avaient rien à voir avec l'affaire des Airbus. Les ministres n'ont absolument pas participé à cette enquête.

Honorables sénateurs, mon honorable collègue me demande de reconnaître que le gouvernement et ses avocats ont participé à l'enquête depuis le début, mais, comme je l'ai dit hier, s'il y a des avocats devant les tribunaux à Montréal, c'est parce que le gouvernement du Canada, la GRC et d'autres font l'objet d'un procès intenté par le demandeur. Voilà pourquoi des avocats-conseils sont devant les tribunaux à Montréal. Honorables sénateurs, cela ne constitue nullement un aveu de notre participation à l'enquête - loin de là.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il est très clair, alors, que le gouvernement du Canada se dissocie complètement des activités de tout corps de police relevant de lui. C'est ce que nous avons entendu. Peu importe qui fait l'objet d'une enquête par la GRC ou tout autre corps de police relevant de lui, le gouvernement ne veut pas être mis au courant ni participer à l'enquête. Laissez faire la police. Qu'elle convainque le ministère de la Justice d'envoyer de faux renseignements au gouvernement suisse. C'est elle qui doit agir, c'est elle qui est responsable et c'est elle qui a le pouvoir. D'autre part, nous, les politiques, les élus, nous n'avons aucune responsabilité à assumer à cet égard.

Honorables sénateurs, admettons-nous aujourd'hui que les forces de police qui relèvent du gouvernement fédéral ont le droit d'agir sans la moindre surveillance, sans observation ni code de conduite? Est-ce cela que nous entendons depuis trois jours?

Le sénateur Fairbairn: Pas du tout, honorables sénateurs. Le sénateur tire ses propres conclusions et porte son propre jugement sur une question très difficile.

Le sénateur Lynch-Staunton: J'ai posé une question.

Le sénateur Fairbairn: Mes collègues et moi avons dit - non pas depuis trois jours, mais de nombreux mois - que cette enquête est menée par la GRC. Le fait qu'un ministre s'ingère dans cette enquête devrait être un grave sujet de préoccupation pour les citoyens du Canada et les sénateurs.

Honorables sénateurs, aucun ministre ne participe à l'enquête menée par la GRC. Ce message a été répété maintes et maintes fois. Je sais que le sénateur tire ses propres conclusions et porte ses propres jugements. Cependant, c'est fondamental, aucun membre du gouvernement ne devrait participer aux enquêtes menées par la Gendarmerie royale du Canada - et aucun ne le fait. C'est le commissaire de la GRC qui est aux commandes et aucun ministre ne participe à l'enquête.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, si vous me permettez de faire une observation, je dirai que c'est un bien triste jour que celui où on nous dit que la police n'a de comptes à rendre à personne sauf à elle-même.

(1450)

Je n'aurais jamais pensé qu'un ministre reconnaîtrait ce que le leader du gouvernement au Sénat nous a avoué aujourd'hui.

Les Pêches

Malpeque, Île-du-prince-Édouard-La disponibilité des fonds pour éventualités pour aider les pêcheurs de homard-La position du gouvernement

L'honorable M. Lorne Bonnell: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à la question du sénateur Phillips au sujet du port de Malpeque.

Le sénateur Phillips a dit que certains pêcheurs perdaient une partie de leurs revenus et que les bateaux ne pouvaient plus sortir du port ni y entrer. Je crains que les pêcheurs perdent aussi la vie. Leurs navires pourraient s'échouer sur les barres de sable et chavirer. Les pêcheurs pourraient se noyer. C'est là un sérieux danger.

Je sais que les gens au ministère des Pêches et des Océans nous diront qu'il n'y a pas d'argent, mais si les pêcheurs faisaient appel à un entrepreneur pour faire faire le travail tout de suite et libérer le port, pourraient-ils envoyer la note au ministère, qui s'occuperait du paiement plus tard?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme dans le cas de la question du sénateur Phillips, je devrai transmettre aussi celle de l'honorable sénateur aux ministres compétents pour voir si je peux obtenir une réponse.

Le sénateur Lynch-Staunton: Transmettez-les à la GRC!

Le revenu national

La possibilité de considérer les fonds de développement communautaire comme des investissements des cotisations à un REER-Demande de réponse

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, il y a quelques semaines, j'ai posé une question concernant le budget présenté par le gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Elle portait sur l'annonce faite par le ministre des Finances de la Nouvelle-Écosse, disant qu'il tenterait d'obtenir l'accord du gouvernement fédéral pour que les investissements dans les sociétés et coopératives de développement économique communautaire soient considérés comme des investissements des cotisations à un REER.

La ministre m'a assuré que je recevrais une réponse très bientôt - en fait, nous avions essayé de l'obtenir avant le mardi suivant. C'était il y a deux semaines. La ministre pourrait-elle essayer d'accélérer l'obtention de la réponse à cette question?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je vais certainement faire cela pour le sénateur Comeau.

Comme je l'ai déjà dit au Sénat quand nous avons parlé des réponses aux questions, je regrette que les résultats tardent tant à venir. Que mes collègues soient ou non satisfaits des résultats, au moins nous faisons des efforts. Mon collègue, le leader adjoint du gouvernement, et moi-même sommes frustrés du temps qu'il faut pour recevoir l'information. Nous avions le même sentiment à la dernière session, et c'est encore pire maintenant. Nous faisons de notre mieux pour exercer des pressions auprès des personnes compétentes. J'assure à mon collègue que sa question est certainement parmi celles auxquelles nous tentons d'obtenir une réponse le plus rapidement possible.

Les Affaires étrangères

Le maintien de la paix-Les positions contradictoires du ministre et des fonctionnaires du ministère-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je crois savoir que la ministre n'est pas plus renseignée aujourd'hui au sujet des hélicoptères qu'elle ne l'était hier, mais peut-être pourrait-elle nous éclairer un peu au sujet de la politique de défense en général.

Nous avons reçu des messages contradictoires dernièrement. Suite aux observations du vérificateur général concernant le coûts des opérations de maintien de la paix, le ministère des Affaires étrangères a indiqué qu'on devait s'attendre sous peu à une diminution sensible du nombre de missions de maintien de la paix. Cela donne à penser que les missions occuperont désormais une place beaucoup moins importante sur la liste des priorités, ce qui semble aller nettement à l'encontre de ce que le ministre disait il y a quelques semaines à peine. M. Axworthy a déclaré que les missions de maintien de la paix allaient devenir le moteur de la stratégie de défense du Canada.

La ministre pourrait-elle nous éclairer au sujet de ces positions apparemment contradictoires?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je le disais au sénateur Comeau, nous avons passé un certain temps au téléphone aujourd'hui en vue d'obtenir les réponses aux questions que l'honorable sénateur m'a posées hier. Dès que nous saurons quelque chose, mon bureau communiquera avec le sien.

En ce qui a trait aux opérations de maintien de la paix, cette question occupe sans aucun doute une place de toute première importance dans la politique étrangère du gouvernement canadien. Ce fait a été confirmé dans le livre blanc ainsi que dans certaines des discussions qui ont eu lieu au sein des comités parlementaires, et notamment dans les deux comités mixtes de la défense nationale et des affaires étrangères. Le gouvernement et les ministères compétents examineront de très près les observations faites par le vérificateur général.

Les missions de maintien de la paix constituent évidemment une entreprise coûteuse. Nous avons déjà montré, par le truchement de divers ministres qui s'occupent de la question, que nous avons commencé à examiner certaines des critiques formulées par le vérificateur général.

Le gouvernement canadien considère les missions de maintien de la paix comme un aspect capital de sa politique étrangère. C'est un engagement irréversible.

Le sénateur Forrestall: Cette réponse me semble contredire tout à fait ce qu'a dit le ministère, ainsi qu'il est relaté au paragraphe 6.29 du rapport du vérificateur général. Cependant, je laisse ma collègue examiner l'affaire.

Le détournement des fonds destinés à l'achat des sous-marins pour acheter du matériel militaire-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Nous assistons au détournement des fonds destinés aux immobilisations, qui vont être utilisés pour moderniser les transports de troupes blindés et d'autres véhicules militaires - une modernisation bien nécessaire - plutôt que pour acheter quatre sous-marins britanniques.

Ce détournement des fonds ne semble-t-il pas confirmer l'idée que le maintien de la paix est effectivement le moteur de notre stratégie militaire, malgré ce qu'en dit le ministère, et qu'il y a un malentendu quelque part? Comme le leader le constatera, les deux objectifs sont absolument contradictoires.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Comme je le disais au sénateur, le maintien de la paix est un élément fondamental de la contribution du Canada dans le monde. Mais notre politique étrangère comporte aussi d'autres éléments essentiels comme l'assistance que nous apportons à d'autres pays et la volonté de doter nos forces du matériel le plus perfectionné possible pour leurs opérations au Canada et à l'étranger.

Évidemment, le gouvernement fait tout cela avec un budget réduit et dans des circonstances restrictives. Il n'y a pas de doute là-dessus. Toutefois, je ne suis pas d'accord avec mon collègue pour dire qu'il y a là une contradiction.

Le sénateur Forrestall: Pour conclure, je citerai un extrait de ce paragraphe. Le ministère des Affaires étrangères signale que les coûts du maintien de la paix ont augmenté ces dernières années parce que les missions sont maintenant plus nombreuses, plus importantes et plus complexes. Il poursuit:

Le Ministère souligne cependant que les dépenses relatives aux missions de maintien de la paix de l'ONU diminueront vraisemblablement de beaucoup dans les mois et les années à venir parce qu'il y aura moins de missions, que certaines des plus importantes arriveront à terme et que les opérations actuelles de l'ONU sont plus modestes.

D'un côté, un ministère dit que les coûts vont diminuer parce que nous ne jouerons plus un rôle aussi actif. De l'autre, après avoir autorisé la Marine - à condition qu'elle puisse trouver les fonds à même son budget - à acheter les quatre sous-marins britanniques, le ministère annule l'achat de ces sous-marins.

Nous allons maintenant acheter des véhicules blindés de transport de troupes et d'autres véhicules pour des opérations de maintien de la paix qui, aux dires du vérificateur général et du ministère de M. Axworthy, devraient être moins nombreuses.

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, de toute évidence, l'étendue de nos missions de maintien de la paix sera déterminée par un certain nombre de facteurs, dont notre rôle et celui de nos alliés dans diverses parties du monde. Comme l'honorable sénateur le sait, nous assumons depuis récemment un rôle de leadership en Haïti, ceci au grand honneur du Canada.

(1500)

En ce qui concerne les sous-marins, la dernière fois que j'ai parlé de cette question au ministre de la Défense nationale - il y a seulement quelques jours - le ministre m'a dit, comme il l'a dit publiquement, qu'aucune décision n'avait été prise à ce sujet.

La Justice

La vente des avions Airbus à Air Canada-Le risque pour les droits des particuliers-La position du gouvernement

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question au leader du gouvernement au Sénat porte sur l'affaire des avions Airbus. Le leader nous a donné ses explications au sujet du rôle des ministres. Certains d'entre nous, de ce côté de la Chambre, ne sont pas d'accord avec cette explication. J'ai parlé à d'anciens ministres de la Justice et d'anciens solliciteurs généraux au sujet du fonctionnement de leurs ministères respectifs. Tous ceux auxquels j'ai parlé m'ont dit qu'ils ne croient pas qu'une chose de cette nature puisse se produire dans leurs ministères respectifs sans qu'ils le sachent.

Est-ce que le leader n'est pas d'avis que le ministre de la Justice a l'obligation de protéger les droits des particuliers, et que dans ce type d'enquête concernant un ancien premier ministre, le ministre de la Justice ou au moins le solliciteur général aurait dû en avoir connaissance?

Personne dans ce pays ne conteste les enquêtes policières ou ne désire les gêner. La question n'est pas là. La lettre dit que Mulroney a fraudé le gouvernement canadien en acceptant des commissions secrètes lors de l'achat d'avions Airbus par Air Canada en 1988.

Pourquoi, dans ce cas, la GRC n'aurait-elle pas traité avec son homologue en Suisse, comme cela se fait quotidiennement? Je sais que le solliciteur général et le ministre de la Justice ne savent pas nécessairement ce qui se passe au sein d'Interpol. J'ai été autrefois policier et je sais comment cela fonctionne. Pourquoi la chose ne se serait-elle pas passée entre corps policiers plutôt qu'entre gouvernements ou entre ministres de la Justice?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, dans ses remarques préliminaires, le sénateur indiquait que lui et d'autres n'étaient pas d'accord avec les réponses qu'ils avaient reçues, et c'est leur droit. Je réponds aux questions de mes collègues aussi ouvertement que je le peux.

Je suis heureuse de voir que mon collègue appuie la GRC parce que, comme cette Chambre l'admettra, pendant toute son histoire, elle a fourni un service extraordinaire à ce pays. Toutefois, je ne suis pas très bien placée pour me lancer dans une discussion sur le fonctionnement interne de la GRC. En ce qui concerne la lettre qui a été envoyée à un autre pays, c'est la voie que suivent traditionnellement de telles lettres. Je regrette de ne pas pouvoir donner plus de détails à mon collègue au sujet des procédures qui pourraient être utilisées par la GRC pour ses enquêtes au Canada et à l'étranger.

Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, la ministre n'a pas répondu à la question que je lui ai posée à propos de la protection des droits d'une personne contre laquelle une accusation directe est portée.

Hier, la ministre a réagi de façon très agressive à ma suggestion que c'était du maccarthysme. Les avocats du gouvernement ont demandé une prolongation de délai d'au moins un an. Les journaux d'aujourd'hui font référence à la lettre. Ils disent qu'elle ressemble plus à un acte d'accusation qu'à une demande de renseignements. Il ne semble pas que le gouvernement essaye de trouver la source de la fuite ou de protéger les droits de cet individu. Il ralentit les choses dans l'espoir, selon moi, de marquer des points politiques. Il me semble que c'est une forme de maccarthysme contre un individu dans notre société. Quelle est la réaction de madame le leader?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, ma réaction aujourd'hui est la même qu'hier et que mon cher collègue qualifie d'agressive. Son point de vue est très agressif, et c'est son droit. Je réagis encore de façon agressive à la mention du mot maccarthysme ainsi qu'à la teneur des questions de mon collègue sur une affaire qui est maintenant examinée par un tribunal à Montréal et qui fait l'objet de plaidoiries et de dépositions. Mercredi prochain, le juge rendra une décision sur la suite à donner à cette affaire.

Je ne suis pas prête à discuter cette affaire dont veut débattre mon cher collègue pendant qu'elle est examinée par un tribunal et entre les mains d'un juge.

Le sénateur St. Germain: La ministre ne convient-elle pas qu'à l'époque du maccarthysme, les libertés individuelles étaient attaquées? Les éditorialistes sont indépendants des activités politiques.

La ministre n'est-elle pas d'avis que les droits d'une personne sont présentement bafoués de manière très agressive? Le gouvernement essaie de ralentir les choses et d'exacerber une situation déjà terrible. Peu importe qu'il s'agisse d'un ancien premier ministre, d'un producteur de volaille de la Colombie-Britannique ou d'un pêcheur de Terre-Neuve. Le gouvernement emploie la force policière pour fouler aux pieds les droits des gens et il se cache derrière ses ministres.

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, le gouvernement ne se cache ni derrière la force policière ni derrière quoi que ce soit. Il existe une procédure judiciaire dans ce pays. Je n'accepte pas les accusations de mon collègue. Nous sommes en total désaccord. Je reconnais qu'il a le droit d'exprimer son point de vue en cette Chambre. J'ai aussi le droit, au nom du gouvernement, de défendre le processus judiciaire de notre pays, même s'il est parfois laborieux. La GRC a ouvert une enquête et le gouvernement du Canada et ses ministres ne doivent pas s'ingérer dans le processus.

(1510)

En ce moment, les tribunaux sont saisis d'une cause où il y a un demandeur, des défendeurs et un juge. L'application des lois, qui régissent et protègent chaque citoyen du pays, doit suivre son cours. Je ne peux, ni à l'intérieur ni à l'extérieur de cette Chambre, intervenir moi-même ou faire intervenir un autre ministre dans les procédures en instance devant les tribunaux. Je ne peux le faire et je ne le ferai pas, sénateur St. Germain.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous avons dépassé largement le temps alloué à la période des questions. Le dernier échange nous a fait prendre cinq minutes de retard. En vertu du Règlement, nous devons donc passer aux réponses différées, à moins que la permission ne soit accordée pour que d'autres questions soient posées.

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: La permission n'a pas été accordée.

Le sénateur Lynch-Staunton: Cela est très significatif.


L'honorable Jean-Robert Gauthier

Les voeux exprimés à l'occasion de son retour à la Chambre

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, même s'il était au Sénat à deux reprises récemment, je n'ai pas eu l'occasion de lui donner la parole. Je voudrais souhaiter bon retour parmi nous à notre collègue, l'honorable sénateur Jean-Robert Gauthier. Même s'il est ici dans des circonstances très difficiles, nous apprécions sa présence.

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur les transports au Canada

Troisième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bacon, appuyée par l'honorable sénateur Lewis, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-14, Loi maintenant l'Office national des transports sous le nom d'Office des transports du Canada, codifiant et remaniant la Loi de 1987 sur les transports nationaux et la Loi sur les chemins de fer et modifiant ou abrogeant certaines lois.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Spivak, appuyée par l'honorable sénateur Forrestall, tendant à ce que le projet de loi ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais à ce qu'il soit modifié,

a) à l'article 27, à la page 11,

(i) en supprimant les lignes 1 à 19 et les lignes 23 et 24,

(ii) en substituant, à l'actuel numéro de paragraphe (4), le numéro de paragraphe (2) et en changeant les renvois à celui-ci en conséquence;

b) à l'article 112, à la page 50

(i) en supprimant l'intertitre qui précède l'article 112,

(ii) en supprimant les lignes 3 à 7,

(iii) en substituant, aux actuels numéros d'articles 113 à 278 les numéros d'articles 112 à 277 respectivement et en changeant les renvois à ceux-ci en conséquence.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur DeWare, appuyée par l'honorable sénateur Bolduc, tendant à ce que le projet de loi ne soit pas lu maintenant pour la troisième fois, mais à ce qu'il soit modifié à l'article 129 par l'addition, après la ligne 36, à la page 59, par ce qui suit:

«(3) Aux fins des articles 129 à 136, l'ancienne ligne de CP Rail qui traverse le Maine est réputée être un parcours se trouvant entièrement au Canada et tout transporteur desservant une portion quelconque de la ligne entre Saint-Jean (Nouveau-Brunswick) et Montréal (Québec) est réputé être un transporteur correspondant et tout endroit où la ligne d'une compagnie ferroviaire communique avec le transporteur correspondant est réputé être un point d'échange.»

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur Andreychuk, tendant à ce que le projet de loi ne soit pas lu maintenant pour la troisième fois, mais à ce qu'il soit modifié en supprimant l'article 171 et en le remplaçant par ce qui suit:

«l'Office doit coordonner ses activités en matière de transport des personnes ayant une déficience avec la Commission canadienne des droits de la personne pour favoriser l'adoption de lignes de conduite complémentaires et éviter les conflits de compétence.»

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, étant donné la décision prise hier, du consentement des deux côtés au Sénat, je suppose que nous avons maintenant un débat ouvert sur ce projet de loi et tous les amendements, car nous avons tourné la procédure normale. À moins qu'il n'y ait des objections, je propose maintenant que nous entendions les sénateurs qui souhaitent intervenir sur n'importe lequel des amendements ou sur le corps du projet de loi lui-même.

Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Si personne ne souhaite intervenir, je mettrai la question aux voix.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je suis déjà intervenue sur ce projet de loi, mais étant donné qu'il y a plusieurs amendements, je suppose que j'ai le droit de simplement clore le débat.

Son Honneur le Président: Sénateur Spivak, il ne s'agit pas de clore le débat. Vous avez le droit de participer au débat, mais votre intervention n'aura pas pour effet de clore le débat.

Le sénateur Spivak: Très bien. Je tiens à dire, honorables sénateurs, à quel point je suis déçue par le manque d'intérêt et le peu de discussions que suscitent les deux très importants amendements qu'on a présentés au comité et qui avaient l'appui de toutes les parties concernées, les producteurs et les expéditeurs par voie ferroviaire dans l'ouest du pays. Les producteurs et les expéditeurs, notamment dans les secteur du charbon, du soufre, des forêts, des céreales, ont réclamé ces amendements.

Étant donné que personne n'a vraiment fait part des arguments en faveur de ces amendements et que personne n'a donné une raison empêchant l'adoption de ces amendements, les Canadiens de l'Ouest ont donc le droit de dire qu'on a traité ces amendements de façon cavalière avant de les rejeter.

Je le répète, ce n'est pas une mince affaire. Il s'agit d'une question de la plus haute importance pour les Canadiens de l'Ouest. Ces questions préoccupent les expéditeurs captifs. Il n'est pas question de spéculation. Ce n'est pas simplement que certains pensent être des expéditeurs captifs. Ils le sont, en fait. Les producteurs céréaliers de High River, en Alberta, doivent franchir 500 kilomètres pour expédier leurs produits par une autre compagnie de chemin de fer. Je ne peux comprendre pourquoi, dans un projet de loi qui avait en général l'appui des gens, personne n'est disposé à tenir compte des intérêts de l'Ouest en adoptant deux amendements qui feraient toute la différence du monde pour les producteurs céréaliers et les expéditeurs, comme ils l'ont tous précisé.

À en juger par ce qui s'est passé ici et dans l'autre Chambre, je peux seulement présumer que, encore une fois, les habitants de l'Ouest se demanderont, comme ils l'ont fait par le passé, pourquoi Ottawa ne défend pas leurs intérêts. Ils se demanderont pourquoi le Sénat, qui a le droit et le devoir d'apporter des amendements s'il estime que l'autre Chambre a négligé d'en apporter ou n'y a pas prêté suffisamment d'attention, ne s'est en pas chargé. Les parlementaires de l'autre Chambre pensent peut-être, comme l'a dit Stan Keyes ici, que les intérêts forestiers ou les producteurs de céréales peuvent tout simplement déménager leurs terrains ailleurs, dans une autre région ou un autre pays. Il s'agit là d'une impression très erronée.

Pourquoi les producteurs de l'Ouest ne devraient-ils pas se sentir abandonnés par le Sénat, qui est censé défendre leurs intérêts régionaux? Nous ne demandons pas que le projet de loi soit rejeté. Nous voulons simplement qu'on y apporte ces amendements. Ma question est légitime. Pourquoi le Sénat n'a-t-il pas débattu ces questions? Les membres du comité ont entendu tous les arguments, mais la majorité des sénateurs ne les ont pas entendus.

Je dois dire aux Honorables sénateurs que les habitants de l'Ouest se diront: «Le Sénat ne fait qu'approuver sans discuter; il n'examine pas nos intérêts attentivement et n'a pas étudié cette question de près.»

Franchement, honorables sénateurs, il s'agit là d'un grave manquement. Rien ne pressait. Nous devons rentrer chez nous demain. Nous aurions tout aussi bien pu débattre la question plus longtemps s'il y avait eu consentement. Ces questions ne sont pas insignifiantes. Ce sont des questions de fond qui préoccupent vivement toutes les industries et la collectivité agricole de l'ouest du Canada.

Je suis très déçue que cela n'ait pas eu lieu. À mon avis, les consommateurs et les expéditeurs canadiens, et non seulement ceux de l'Ouest, ne l'oublieront pas facilement. Ils n'oublieront pas cela et penseront encore une fois que le Sénat n'a pas bien défendu leurs intérêts.

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, j'aimerais moi aussi exprimer mon inquiétude face au peu de considération que l'on a accordée à ces amendements. J'ai l'impression que non seulement l'Ouest, mais aussi les autres régions rurales du Canada sont laissés pour compte dans cette affaire. Je suis convaincu que cela va finir par hanter les gens d'en face. Ce projet de loi ne va pas disparaître sans laisser de traces. Il va refaire surface pour vous anéantir aux prochaines élections, parce que vous avez encore passé outre aux préoccupations du monde rural, lequel a le plus grand besoin de chemins de fer. Vous autoriserez les sociétés ferroviaires à faire ce que bon leur semble en ce qui concerne les tarifs et la fermeture de lignes. Vous allez regretter amèrement le jour où vous l'avez fait, car cela vous coûtera vos sièges aux prochaines élections.

L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, étant un éternel optimiste, je ne suis pas prêt à abandonner si tôt la partie. Nous constatons que ce projet de loi n'est pas entièrement mauvais. En gros, c'est même une bonne mesure législative. Ce sont également de bons amendements. Les amendements portant sur les expéditeurs captifs, notamment ceux de l'Ouest, dans les secteurs de la potasse, des produits forestiers, des pâtes et papiers, des céréales, et cetera sont de bons amendements. L'amendement qui considère la ligne dans les Maritimes comme faisant partie du réseau canadien est un bon amendement. C'était comme ça autrefois et cela a fonctionné ainsi longtemps. Ce sont là de bons amendements.

(1520)

J'aurais espéré que les sénateurs d'en face auraient perçu la sagesse de ces amendements, et c'est peut-être le cas. C'est pourquoi je ne suis pas prêt à abandonner immédiatement la partie. En effet, j'espère qu'ils vont y souscrire. Leurs sièges ne seront pas en péril aux prochaines élections, comme on l'a laissé entendre. En fait, ils vont même faire quelques gains dans les régions où les expéditeurs captifs vont être durement touchés parce que l'on n'aura pas pris suffisamment en considération ces amendements.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne veut intervenir, nous allons mettre aux voix les trois amendements proposés hier. Cette façon de procéder est conforme à l'entente que nous avons conclue hier. À cet égard, j'aimerais rappeler ce que le sénateur Graham a dit:

Nous nous sommes également mis d'accord pour que l'étude de ces amendements soit le premier point à l'ordre du jour de demain. Bien sûr, nous discuterons d'abord de ces amendements, puis nous reviendrons à la motion principale.

C'est ce que le Sénat a convenu hier. Nous traiterons donc de tous ces amendements que je rappelle, en inversant l'ordre dans lequel ils ont été proposés: la motion du sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Andreychuk, qui modifie le projet de loi en supprimant l'article 171 et en substituant... Voulez-vous que je lise tous les amendements, honorables sénateurs?

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Nous sommes donc saisis d'une première motion d'amendement proposée par l'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Andreychuk, d'une deuxième motion d'amendement proposée par l'honorable sénateur DeWare, appuyé par l'honorable sénateur Bolduc et d'une troisième motion d'amendement proposée par l'honorable sénateur Spivak, appuyée par l'honorable sénateur Forrestall.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter les motions d'amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs. Y a-t-il un accord entre les whips?

Le sénateur Kinsella: Un whip est ici, mais l'autre est absent.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je crois qu'on cherche le sénateur Kirby.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, à moins d'indication contraire, j'ordonnerai que le timbre retentisse pendant 60 minutes.

L'honorable Jacques Hébert: Je proposerais plutôt 15 minutes.

Son Honneur le Président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour que le timbre retentisse pendant 15 minutes?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Nous procéderons donc au vote dans 15 minutes, après l'appel du timbre.

(Les motions d'amendement sont rejetées.)

POUR

LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuck, Atkins, Balfour, Beaudoin, Berntson, Bolduc, Cochrane, Cogger, Comeau, Forrestall, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, MacDonald (Halifax), Meighen, Phillips, Rivest, Rossiter, Spivak, St. Germain, Stratton-21 

CONTRE

LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Anderson, Bacon, Bonnell, Bosa, Bryden, Carstairs, Cools, Corbin, De Bané, Fairbairn, Forest, Gauthier, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Kenny, Landry, Losier-Cool, MacEachen, Maheu, Marchand, Milne, Pearson, Petten, Riel, Rizzuto, Robichaud, Rompkey, Roux, Stanbury, Stewart, Taylor, Watt-37 

ABSTENTIONS

LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Bacon propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Lewis: Que le projet de loi soit lu une troisième fois.

Vous plaît-il d'adopter la motion, honorables sénateurs?

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté avec dissidence.)

Projet de loi sur le ministère du Développement des ressources humaines

Troisième lecture

L'honorable Bill Rompkey propose: Que le projet de loi C-11, Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines et modifiant ou abrogeant certaines lois, soit lu une troisième fois.

(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

Le Code canadien du travail

Projet de loi modificatif-Troisième lecture

L'honorable Peter Bosa propose: Que le projet de loi C-3, Loi modifiant le Code canadien du travail (entreprises nucléaires) et une autre loi en conséquence, soit lu une troisième fois.

(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

La Loi canadienne sur les droits de la personne

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Losier-Cool, appuyée par l'honorable sénateur Carstairs, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour aborder le projet de loi C-33. Je voudrais tout d'abord remercier le sénateur Kinsella pour l'intérêt constant qu'il prête à la justice sociale.

Honorables sénateurs, je retracerai l'historique de la persécution dont ont été victimes les homosexuels et je décrirai ensuite certaines réserves qui m'ont été transmises au sujet de ce projet de loi.

La persécution des homosexuels est bien documentée tout au long de l'histoire. Le cas d'Oscar Wilde traduit de façon particulièrement poignante la douleur et la souffrance que les homosexuels ont dû endurer aux mains de l'État et de leurs concitoyens. Oscar Wilde, écrivain britannique du XIXe siècle, était homosexuel et a vécu une relation avec lord Alfred Douglas, le fils du marquis de Queensberry. Lord Alfred nourrissait de l'hostilité envers son propre père, le marquis, qui, à son tour, se montrait hostile envers Wilde et la relation homosexuelle qu'entretenait celui-ci avec son fils. Le marquis et Wilde ont échangé des mots. Lord Alfred, l'amant de Wilde, a incité Oscar Wilde à intenter un procès au marquis. Wilde, vulnérable et désireux de plaire à son amant, a intenté un procès en diffamation contre le marquis et fut alors arrêté.

Les efforts de Wilde pour porter atteinte au marquis n'ont pas réussi. Par conséquent, le marquis a répliqué et a fait arrêter Wilde, l'accusant du crime d'homosexualité, c'est-à-dire d'avoir commis des actes «de grossière indécence avec des personnes de sexe masculin». Le 25 mai 1895, le jury a reconnu Oscar Wilde coupable des accusations qui pesaient contre lui. Le juge Wills a condamné l'écrivain alors âgé de 41 ans à deux années d'emprisonnement et de travaux forcés. Plus tard, Oscar Wilde s'est décrit en ces termes:

J'ai fait de mon nom un synonyme du plus vil d'entre les vils...

Pendant qu'il purgeait sa peine à la prison de Reading, Wilde a écrit De Profundis, une lettre épique dans laquelle il décrit ses énormes souffrances. Il s'est d'ailleurs inspiré duPsaume 130 pour trouver le titre. Permettez-moi de vous lire un extrait du psaume 130:

Du fond de l'abîme, je t'invoque, ô Éternel!
Seigneur, écoute ma voix! Que tes oreilles soient attentives À la voix de mes supplications...
Mon âme compte sur le Seigneur,
Plus que les gardes ne comptent sur le matin,
Que les gardes ne comptent sur le matin.

La société londonienne a été dure envers Oscar Wilde, appelant l'homosexualité le «vice de Wilde». L'écrivain a tout perdu, ses enfants, sa propriété, sa réputation. La honte et le scandale dont il a été victime sont indescriptibles. Dans son De Profundis, Oscar Wilde a légué pour la postérité un récit éloquent de son tourment et de ses souffrances. Il y dit:

La souffrance est un très long moment. On ne peut le diviser en saisons. On ne peut qu'en consigner les nuances et noter leur retour.

Le chagrin et la tristesse sont venus frapper aux portes de ma prison; on a ouvert les portes toutes grandes et on les a laissés entrer.

Honorables sénateurs, bien des souffrances ont été endurées par des personnes qui, comme Wilde, ont été accusées et reconnues coupables d'un crime et emprisonnées à cause de leur homosexualité, ou qui ont craint un tel châtiment. Une telle discrimination et un tel motif de persécution ont été supprimés au Canada en 1969, lorsque l'homosexualité a été décriminalisée. Avec la Loi de 1968-1969 modifiant le Code criminel, l'homosexualité entre adultes consentants a cessé d'être visée par les dispositions du code relatives aux actes de grossière indécence.

Le 23 janvier 1969, le ministre de la Justice de l'époque, l'honorable John Turner, a dit ceci au cours du débat de deuxième lecture du projet de loi de 1968-1969 modifiant le Code criminel, à l'autre endroit:

Ces modifications soustraient certaines pratiques sexuelles entre adultes consentants du dispositif du code criminel.

On entendait par adultes des personnes de 21 ans et plus.

(1550)

Honorables sénateurs, la modification de M. Turner et du premier ministre Trudeau découlait en partie de la triste et terrible histoire d'Everett George Klippert et du jugement rendu en 1967 par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Everett George Klippert c. Sa Majesté la reine. Klippert, un homosexuel de 39 ans de la petite localité de Pine Point, dans les Territoires du Nord-Ouest, était connu des agents de police et recevait fréquemment leur visite. Son casier judiciaire affichait 18 condamnations pour des chefs d'accusation similaires. En 1965, Klippert plaida coupable à quatre accusations de «grossière indécence». Après le prononcé de sa sentence, la Couronne demanda qu'il soit déclaré délinquant sexuel dangereux. Le juge Sissons fit la constatation et condamna Klippert à une peine de détention préventive.

Deux psychiatres témoignèrent que M. Klippert n'avait jamais fait de mal à personne et qu'il n'en ferait probablement jamais à personne, mais qu'il commettrait probablement à nouveau le même délit avec d'autres adultes consentants de sexe masculin. Bref, Klippert était homosexuel et le serait probablement toujours.

Le juge Sissons déclara que M. Klippert était un délinquant sexuel dangereux parce qu'il était un homosexuel actif. L'appel que M. Klippert interjeta auprès de la Cour d'appel des Territoires du Nord-Ouest fut rejeté. M. Klippert en appela à la Cour suprême du Canada, qui le débouta aussi. Dans le jugement de la Cour suprême, il y avait deux juges dissidents, soit le juge en chef J. Cartwright et le juge Emmett Hall, qui ont fait savoir qu'ils auraient accordé l'appel. Le juge en chef Cartwright a fourni leurs raisons par écrit. Honorables sénateurs, ces raisons ont motivé en partie la décision politique du gouvernement de décriminaliser l'homosexualité en 1968-1969. Expliquant que M. Klippert n'était pas violent ni dangereux pour personne et qu'il n'avait eu des relations sexuelles qu'avec des adultes consentants, le juge en chef Cartwright a dit ceci:

Je me réjouis d'en arriver à cette conclusion. C'est avec réticence et regret que je me serais vu dans l'obligation d'imputer au Parlement l'intention de faire que l'expression «délinquant sexuel dangereux» s'applique à un délinquant sexuel qui n'est pas dangereux.

[...] Je trouve peu probable que le Parlement ait voulu un tel résultat.

Cette loi n'a pas annulé la peine de Klippert. Toutefois, faisant preuve de clémence à son égard, les autorités lui ont accordé une libération conditionnelle deux ans plus tard, en 1971.

Honorables sénateurs, cette cause ne veut peut-être pas dire grand-chose pour nombre d'entre vous, mais quand je siégeais à la Commission nationale des libérations conditionnelles, j'ai demandé à voir ce dossier et je l'ai lu au complet. Il s'agit sûrement d'une cause marquante dans l'histoire de notre pays.

L'affaire Klippert est effrayante et nous rappelle, hélas, que la persécution et la discrimination contre les homosexuels choquent notre humanité et notre sens de la dignité.

Honorables sénateurs, je voudrais traiter de certaines questions dont m'ont parlé nombre de membres de l'autre endroit et de divers organismes. Gwendolyn Landolt, vice-présidente nationale de REAL Women of Canada, et Mgr Marcel Gervais, archevêque de l'Église catholique romaine d'Ottawa, m'ont rencontrée. L'évêque Dale Shaw, de la Communion chrétienne nouvelle-vie, le père John Affleck, prêtre catholique, les révérends Tracey Lloyd et David Thurlow, ministres anglicans en Saskatchewan, et bien d'autres m'ont fait part de leurs préoccupations.

Leur première préoccupation est la préservation de la famille. Le premier ministre Chrétien a fait insérer dans le projet de loi C-33 un préambule qui se lit en partie comme suit:

[...] le gouvernement du Canada reconnaît et proclame l'importance de la famille comme fondement de la société canadienne et que la présente loi ne porte pas atteinte à son rôle fondamental dans la société;

Ce préambule est un avertissement, un signal de l'intention du gouvernement de sauvegarder la famille.

Une autre question soulevée par tous est le recours aux droits de la personne confirmé par le droit administratif en tant que mécanisme pour faire avancer d'autres revendications visant à faire modifier d'autres lois, comme le Code criminel, la Loi sur le mariage et la Loi sur le divorce. Dans l'arrêt de la Cour suprême du Canada rendu en 1993 dans l'affaire Le Canada (Le procureur général) c. Mossop, le juge en chef, Antonio Lamer, a fait l'obiter dictum suivant:

[...] si le législateur avait décidé d'inclure l'orientation sexuelle à la liste des motifs prohibés de discrimination, mon interprétation de l'expression «situation de famille» aurait pu être fort différente et j'aurais peut-être alors conclu que la situation de M. Mossop mettait en jeu à la fois son orientation sexuelle et sa «situation de famille».

Honorables sénateurs, le problème, c'est que l'expression «orientation sexuelle», dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, est vaste, extensible, floue et non définie. Ils veulent que l'expression «orientation sexuelle» soit mieux définie, comme l'âge, le sexe et la race. Ils craignent que cette expression soit suffisamment vaste pour englober les hétérosexuels. Ils pensent qu'on pourrait invoquer l'orientation sexuelle pour défendre la bigamie, la polygamie, les liaisons multiples, les mariages entre personnes de même sexe et d'autres pratiques qui compromettront la définition de la famille et du mariage.

Une autre préoccupation qu'ils ont exprimée concerne la pédophilie, aussi bien hétérosexuelle que homosexuelle. Ils craignent que l'expression «orientation sexuelle» puisse être élargie de manière à inclure les intérêts relatifs à la pédophilie et que des juristes et des demandeurs puissent donc l'invoquer pour justifier des prétentions non visées par le projet de loi C-33. Certains ont exprimé des craintes concernant l'inceste, aussi bien hétérosexuel que homosexuel; certains craignent que la pédophilie hétérosexuelle résultant de l'inceste entre un père et sa fille ne soit sanctionnée; d'autres craignent la promotion de la pédophilie homosexuelle et celle de la prétendue liberté sexuelle des jeunes et des enfants. Dans un bulletin de Behaviour Today en date du 5 décembre 1988, un article fait état d'une allocution que le docteur Sharon Satterfield a prononcée lors d'une conférence sur la sexologie qui a eu lieu à Guelph, en Ontario, et il y est dit ceci:

Le docteur Satterfield [...] a dit que la pédophilie - un état qui se traduit par l'attirance sexuelle que des adultes éprouvent pour des enfants prépubertaires - peut être une orientation sexuelle plutôt qu'une déviation. Elle a ensuite soulevé la question de savoir si les pédophiles peuvent avoir des droits.

Le docteur Satterfield exprime une inquiétude que bon nombre de Canadiens éprouvent, soit la crainte qu'on puisse invoquer l'expression «orientation sexuelle» incluse dans la Loi canadienne sur les droits de la personne pour faire valoir que les activités pédophiles hétérosexuelles et homosexuelles sont reconnues comme des droits de la personne.

Une autre préoccupation, qui est différente celle-là, est la pédérastie et l'utilisation du terme «orientation sexuelle» pour promouvoir la pédérastie, qui est définie comme étant des relations sexuelles, comprenant la sodomie, entre des hommes adultes et des jeunes garçons. L'édition de l'hiver 1990 de la publication canadienne Victims of Violence Report renfermait un chapitre intitulé The paedophile and his organizations, dans lequel on citait une interview faite par le magazine Playboy avec un pédophile membre de la Société René Guyon, une organisation nationale qui promeut les relations sexuelles avec les enfants, qui disait - et ces propos sont très troublants - que:

la cavité (anale) chez les garçonnets et fillettes de quatre ans est assez grande pour recevoir un pénis d'adulte sans douleur, un acte qu'ils désirent constamment de la part des hommes qu'ils aiment.

Ces préoccupations sont exacerbées par NAMBLA, la North American Man/Boy Love Association, et par des personnes comme Gerald Hannon, professeur au Ryerson Polytechnical Institute, à Toronto, qui défend les relations sexuelles entre les hommes adultes et les garçons comme une question de droit. La Canadienne Judy Steed, dans son livre intitulé Our Little Secret: Confronting Child Sexual Abuse in Canada, a dit ceci au sujet de Hannon:

Il croit que les relations sexuelles pédophiles ont été injustement avilies par une société puritaine et hypocrite.

Hannon, dans son article célèbre intitulé Men loving boys loving men, réimprimé dans le livre Flaunting it! A decade of gay journalism from The Body Politic, cite en ces termes les réflexions d'un pédophile:

[...] je crois que mes relations donnent à tous les enfants l'occasion d'essayer une forme parfaitement valable d'activité sexuelle. Il n'y a aucune menace, et cela leur donne une genre d'équilibre, une plus grande objectivité qu'ils n'auraient pas autrement.

Honorables sénateurs, certains pédophiles disent que les enfants les ont séduits et que les enfants veulent cette activité sexuelle.

Honorables sénateurs, dans un article publié dans le Ottawa Sun du 24 avril 1996, Michael Coren cite les paroles de David Thorstad, de la North American Man/Boy Love Association, qui aurait dit ceci:

Le but ultime de la libération des homosexuels est la liberté sexuelle pour tous - non pas seulement des droits égaux pour les gais et les lesbiennes, mais aussi la liberté d'expression sexuelle pour les jeunes et les enfants.

Ce que nous craignons, c'est que les pédérastes et les pédophiles invoquent les droits de la personne pour promouvoir les relations sexuelles avec des enfants, qu'on soutienne que la pédérastie et la pédophilie sont des orientations sexuelles qui donnent des droits. Le projet de loi C-33 ne doit laisser aucune place à interprétation par les tribunaux. L'intention du Parlement doit être claire. Le Parlement doit combattre la discrimination contre les homosexuels et il doit le faire explicitement.

(1600)

Il n'est pas souhaitable de laisser certaines affaires entre les mains des tribunaux, car ils ne sont pas destinés à gouverner. Le juge en chef McClung, de la Cour d'appel de l'Alberta, nous dit ceci dans Vriend c. Alberta, une affaire de congédiement illégal d'un homosexuel:

Lorsque des juges non élus choisissent de légiférer, le système d'équilibre et les conventions parlementaires sont tout simplement mis de côté. Pourtant, il a fallu des siècles pour mettre en place ces pierres angulaires de notre régime [...] (Lorsque les juges légifèrent, ils ne rencontrent aucune opposition à leurs décisions.) Toutes ces ressources formatives restent en suspens lorsque des juges obnubilés par les droits précipitent leurs tribunaux dans les eaux incertaines du débat politique.

Il ajoute:

[...] les solutions judiciaires sont des choix contraints; [...] j'ai déjà dit que, une fois les décisions rendues, elles peuvent devenir des interventions embarrassantes, voire nuisibles, pour l'équilibre de la société.

Son Honneur le Président: J'hésite à interrompre l'honorable sénateur, mais ses 15 minutes sont écoulées.

Le sénateur Cools: Puis-je continuer, honorables sénateurs?

Le sénateur Lynch-Staunton: Nous laissons toujours les orateurs conclure.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Cools: Le juge en chef a déclaré que l'ordre public était l'affaire du Parlement, pas des tribunaux, et que le Parlement devait adopter des lois claires. L'expression «orientation sexuelle» n'est pas définie dans le projet de loi. Beaucoup craignent que ceux qui veulent d'autres modifications au Code criminel et à d'autres lois fédérales s'appuient sur cette expression pour arriver à leurs fins.

Au moment du débat en deuxième lecture du projet de loi de 1968-69 modifiant le droit pénal, l'ex-ministre de la Justice, John Turner, a cité le passage suivant du rapport d'un comité du Royaume-Uni sur les délits homosexuels et la prostitution, connu sous le nom de rapport «Wolfenden»:

À moins que la société ne s'efforce délibérément, par l'intermédiaire de la loi, d'établir un parallèle entre le crime et le péché, il restera le domaine de la moralité ou de l'immoralité privée qui, disons-le crûment, ne regarde pas la loi. [...] souligner la nature personnelle et privée de la conduite morale ou immorale, c'est mettre en relief la responsabilité personnelle et privée de l'individu à l'égard de ses propres actions [...]

À l'époque, on disait que «l'État n'a rien à faire dans les chambres à coucher des citoyens». Honorables sénateurs, le Parlement doit définir clairement «orientation sexuelle» ou l'État sera contraint de remettre le nez dans les chambres à coucher des citoyens.

Ce projet de loi n'a pas reçu toute l'attention voulue. Le débat dont il a fait l'objet a été marqué par beaucoup d'intolérance et par un grand manque de charité. Toutes les critiques et propositions visant à l'améliorer ont été durement reçues. Les préoccupations exprimées au sujet du projet de loi C-33 sont délibérément comprises de travers et donnent lieu à des accusations d'homophobie et de fanatisme. Certains ont fait preuve d'intolérance. Honorables sénateurs, je sais ce qu'est la discrimination et j'ai moi-même passé des années à panser les plaies de nombreux homosexuels qui ont durement souffert de la cruauté humaine.

Depuis des générations, des enfants sont utilisés et exploités par des adultes à des fins sexuelles diverses. Les lois qui interdisent l'exploitation sexuelle des enfants n'existent en fait que depuis le début de ce siècle. Il existe de plus en plus d'indices qui donnent à penser que des personnes et des organisations se regroupent pour promouvoir la libération sexuelle des enfants et les rapports sexuels entre adultes et enfants. Ce fait nous indigne tous, homosexuels et hétérosexuels. L'exploitation sexuelle des enfants est une chose tellement choquante et troublante que beaucoup de gens préfèrent croire qu'elle n'existe pas. En agissant ainsi, ils tournent le dos aux souffrances de nombreux enfants. Honorables sénateurs, mon expérience de la vie m'a permis de constater ce côté sombre de la vie humaine. J'ai examiné cet aspect à fond.

Je demanderai au comité d'obtenir certains éclaircissements du ministre pour savoir, premièrement, s'il est possible de faire valoir en droit que la pédophilie et la pédérastie sont des orientations sexuelles et que cela soulève la question des droits de la personne; deuxièmement, quelles autorités, doctrines, jurisprudence et lois donnent raison au ministre; troisièmement, si le ministre a envisagé la possibilité que les tribunaux soient amenés à interpréter l'orientation sexuelle comme incluant les rapports pédophiles homosexuels et hétérosexuels en tant que droit de la personne; quatrièmement, si le ministre présume que les tribunaux n'interpréteront pas l'orientation sexuelle comme incluant les rapports pédophiles homosexuels et hétérosexuels, est-il prêt à intervenir immédiatement pour rectifier les jugements des tribunaux si ces derniers lui donnent tort? Enfin, le comité devrait demander au ministre comment il entend préserver le préambule concernant la protection de la famille, qui a été ajouté par le premier ministre et qui préoccupe de nombreuses personnes.

J'exhorte les honorables sénateurs à examiner ces questions de près au comité. Je me réjouis des aspects du projet de loi qui visent à prévenir la discrimination et j'invite le comité à corriger les lacunes contenues dans la formulation du projet de loi.

Je terminerai sur une citation du De Profundis d'Oscar Wilde. Il disait ceci:

Il n'existe qu'une saison pour nous, celle de la tristesse.

Le projet de loi C-33 doit atténuer la souffrance et les angoisses que supportent injustement de nombreux homosexuels. Honorables sénateurs, le projet de loi C-33 doit aussi répondre aux préoccupations de nombreux Canadiens.

L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, je n'avais pas l'intention d'intervenir à propos de ce projet de loi à ce stade. Cependant, je me sens obligée de le faire après avoir écouté cette dernière intervention.

Honorables sénateurs, ce projet de loi ne porte pas sur la pédophilie. La pédophilie est un crime. C'est un crime contre des enfants. Toute forme d'agression sexuelle contre des enfants est un crime. J'ai été personnellement victime d'une agression sexuelle lorsque j'étais enfant. Cela veut-il dire que parce que l'auteur de cette agression était un hétérosexuel, je devrais refuser le droit au logement à tous les hommes hétérosexuels? Que je devrais pouvoir de leur refuser le droit au logement? Que je devrais leur refuser le droit à l'accès aux biens et aux services? Que je devrais pouvoir leur refuser leur droit à l'emploi, sous prétexte que l'homme qui m'a violée était un hétérosexuel?

Honorables sénateurs, ce projet de loi modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il traite de trois choses: le droit à l'accès aux biens et aux services, le droit à l'emploi et le droit au logement. C'est tout.

Je demande que nous adoptions ce projet de loi.

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs...

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je dois informer le Sénat que si l'honorable sénateur Rose-Marie Losier-Cool prend la parole maintenant, son discours aura pour effet de mettre fin au débat en deuxième lecture du projet de loi.

Le sénateur Losier-Cool: J'ai écouté avec intérêt les différents commentaires qui ont été faits à propos de ce projet de loi, honorables sénateurs. Je répète, encore une fois, que ce projet de loi concerne les droits de la personne, et que les gais et les lesbiennes sont des êtres humains. Nous devons protéger leurs droits.

J'attends avec impatience l'examen de ce projet de loi en comité.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Losier-Cool, appuyée par l'honorable sénateur Carstairs, propose: Que ce projet de loi soit lu une deuxième fois. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Avec dissidence?

Le sénateur St. Germain: Convoquez les sénateurs.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Les deux whips m'ont informé qu'ils s'étaient entendus pour que le timbre sonne pendant 15 minutes. La permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Nous voterons à 16 h 25.

(1620)

(La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

POUR

LES HONORABLES SÉNATEURS

Bacon, Beaudoin, Berntson, Bosa, Bryden, Carstairs, Cogger, Cools, Corbin, De Bané, Fairbairn, Forest, Gauthier, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Kenny, Kinsella, Landry, LeBreton, Losier-Cool, MacDonald (Halifax), MacEachen, Marchand, Milne, Pearson, Petten, Prud'homme, Riel, Robichaud, Rompkey, Roux, Simard, Spivak, Stanbury, Stewart, Taylor-40

CONTRE

LES HONORABLES SÉNATEURS

Phillips, St. Germain, Stratton-3

ABSTENTIONS

LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Losier-Cool, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

La Loi sur l'assurance-emploi

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Bill Rompkey propose: Que le projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada, soit lu une deuxième fois.

(1630)

-Honorables sénateurs, je suis heureux qu'on me donne la chance de présenter un survol de la nouvelle loi sur l'assurance-emploi présentée par le gouvernement dans le projet de loi C-12.

Avec le projet de loi C-12, le gouvernement remplace le programme d'assurance-chômage, vieux de 55 ans, par le programme d'assurance-emploi. Après de vastes consultations, il est devenu évident que le programme d'assurance-chômage est désuet. Il nous a bien servis, mais les temps ont changé.

L'assurance-emploi est un système moderne et équilibré qui favorise l'emploi et qui répondra aux besoins des Canadiens à notre époque de restructuration économique et pour bien des décennies à venir.

Cette mesure aidera les Canadiens à retourner sur le marché du travail aussi vite que possible. Dans le cadre de la réforme des programmes sociaux, l'assurance-emploi est conçue pour assurer l'équité, renforcer les incitations au travail, aider les travailleurs à s'adapter aux changements économiques grâce à des réinvestissements et à des mesures d'emploi actives, en plus de permettre au gouvernement de réaliser des économies de 1,2 milliard de dollars d'ici l'an 2001-2002.

[Français]

C'est pourquoi l'assurance-emploi est un système à deux volets. Dans le premier volet, la restructuration des prestations de soutien du revenu assurera chaque année une aide temporaire à environ 2,4 millions de prestataires pendant qu'ils se chercheront du travail. Dans le deuxième volet, les prestations d'emploi dites «actives» viendront en aide chaque année à quelque 400 000 chômeurs.

Je vais d'abord expliquer le premier volet du projet de loi.

[Traduction]

Contrairement à l'assurance-chômage, en vertu de laquelle une personne devait travailler un certain nombre de semaines pour avoir droit à des prestations, l'admissibilité à l'assurance-emploi sera basée sur le nombre total d'heures travaillées. Le nombre d'heures nécessaire pour avoir droit aux prestations dépendra du taux de chômage local. Dans les zones à chômage le plus élevé, une personne devra travailler au moins 420 heures. Dans les régions où le chômage est le plus faible, il faudra travailler 700 heures. C'est l'une des différences les plus importantes et les plus fondamentales qui permettra à de nombreuses personnes d'avoir maintenant accès au programme.

À compter de janvier 1997, chaque heure de travail sera comptée. Compter les heures de travail est un moyen beaucoup plus réaliste de juger du travail d'une personne dans l'économie d'aujourd'hui. Tous les travailleurs à temps partiel deviendront assurables. Cela signifie que la plupart des travailleurs auront plus facilement droit à des prestations.

Ce qui est important également, c'est que l'on pourra compter les heures réelles de travail, même si elles dépassent 35 heures par semaine, allongeant ainsi la durée du travail. Lorsqu'une personne aura droit à des prestations, celles-ci seront calculées d'une façon qui reflète l'effort professionnel. Un demandeur qui n'aura que le nombre minimum recevra une prestation qui sera plus faible qu'une personne qui a travaillé plus d'heures que le minimum.

Pour optimiser les prestations, en faisant en sorte que les rémunérations moyennes utilisées pour le calcul des prestations soient égales au salaire hebdomadaire, un demandeur peut devoir travailler deux semaines de plus que le minimum régional requis.

Les prestations seront en fait calculées en prenant les rémunérations totales du demandeur sur une période de 26 semaines avant sa plus récente cessation d'emploi et en divisant ces rémunérations par le dénominateur approprié. Ce dénominateur ira d'un minimum de deux semaines plus le minimum requis pour la région, jusqu'à un plafond de 26 semaines. C'est-à-dire que le dénominateur minimum ira de 14 semaines dans les zones à fort chômage à 22 semaines dans les zones à faible chômage. Mais le dénominateur pour les demandeurs qui ont travaillé deux semaines de plus sera identique au nombre de semaines de travail, jusqu'à un maximum de 26. Cette disposition est destinée à encourager les gens à accepter tout travail disponible, y compris pendant les interruptions de leur travail habituel.

Honorables sénateurs, les amendements du gouvernement au projet de loi C-12 ont corrigé un certain nombre de carences du projet de loi original. C'est un amendement présenté par un député de la majorité de la région de l'Atlantique, pendant les délibérations du comité permanent de l'autre endroit, qui a modifié le dénominateur pour ajouter la disposition de deux semaines en plus du minimum régional.

On a noté également que de nombreux demandeurs pourraient ne pas travailler des semaines consécutives avant de présenter une demande. De ce fait, grâce à un autre amendement proposé par un député de la majorité, les demandeurs ne seront pas pénalisés pour les interruptions de rémunération pendant une période de 26 semaines. Toute rémunération au cours des 26 dernières semaines sera incluse dans le calcul des prestations. Ainsi, il ne sera pas tenu compte des semaines sans rémunération, pourvu que le demandeur ait travaillé au moins deux semaines de plus que le dénominateur minimum.

Honorables sénateurs, les principes d'équité et d'équilibre se retrouvent partout dans cette mesure législative. Le comité permanent de l'autre endroit a tenu de vastes consultations et écouté les témoignages de Canadiens de toutes les couches de la société. Ce comité s'est fait dire que les Canadiens voulaient un système d'assurance qui aide ceux qui ont réellement besoin d'un soutien du revenu temporaire. Toutefois, le pourcentage d'assurés ayant demandé des prestations trois fois ou plus au cours d'une période de cinq ans est passé à 40 p. 100.

Quatre prestataires sur dix font régulièrement appel au régime pour ajouter un supplément à leur revenu. Cela fait ressortir l'une des nombreuses faiblesses du régime d'assurance-chômage. Il s'est peu à peu transformé en régime de supplément de revenu, de soutien du revenu, et il n'avait pas été conçu en ce sens. Il dissuade les gens de travailler et crée une dépendance permanente, ce qui est encore plus grave.

En vertu de l'assurance-emploi, les prestataires ayant reçu des prestations pendant plus de 20 semaines au cours des cinq années précédentes verront leurs prestations diminuer graduellement. Le taux sera réduit de un pour cent pour chaque tranche de 20 semaines de prestations antérieures, jusqu'à un plancher de 50 p. 100.

Les honorables sénateurs qui croient que la règle de l'intensité pourrait causer des difficultés indues aux salariés à faibles revenus seront heureux d'apprendre qu'un autre amendement veillera à ce que cela ne se produise pas. Les prestataires admissibles au supplément familial seront exemptés de la règle de l'intensité. Le supplément familial s'ajoutera aux prestations de l'assurance-emploi conformément aux circonstances familiales. En moyenne, il s'élèvera à 800 $ par année par famille. Le supplément augmentera de 12 p. 100 environ les prestations de 350 000 familles de prestataires gagnant moins de 26 000 $ par année. Certains prestataires à faible revenu familial auront droit à des prestations d'assurance-emploi pouvant atteindre 80 p. 100 de la rémunération assurable, comparativement au taux de base, fixé à 55 p. 100. La règle de l'intensité ne réduira donc pas le niveau de prestations des prestataires admissibles au supplément familial.

Un autre amendement présenté par le gouvernement veillera à ce que les prestataires reçoivent un crédit pour tout travail effectué pendant qu'ils reçoivent des prestations. Cette disposition modifiée permettra de verser 24 millions de dollars additionnels à 188 000 prestataires appartenant à des familles à faible revenu. Cette mesure encouragera la déclaration honnête des gains et réduira les abus.

À l'autre extrémité de l'échelle, une mesure plus vigoureuse de récupération dissuadera les hauts salariés d'abuser du système. Le seuil de base pour le remboursement sera abaissé de 63 000 $ à 48 000 $, et à 39 000 $ pour les prestataires ayant reçu des prestations pendant plus de 20 semaines.

Selon le nombre de semaines de prestations reçues au cours des cinq dernières années, les prestataires pourraient devoir rembourser entre 30 p. 100 des prestations, dans le cas des prestataires ayant eu peu recours à l'assurance-emploi dans le passé, et 100 p. 100, dans le cas de ceux qui ont reçu des prestations pendant plus de 120 semaines au cours des cinq dernières années.

Le chiffre de 39 000 $, honorables sénateurs, est également le montant qui est utilisé pour le calcul du revenu annuel maximum assurable. Ce chiffre est d'environ 30 p. 100 supérieur au salaire moyen dans l'industrie canadienne. L'assujettissement du premier dollar combiné au plafonnement du MRA à 39 000 $ feront en sorte qu'une plus grande portion de la rémunération sera assurée pour un plus grand éventail de régimes de travail.

En fait, grâce à l'assujettissement du premier dollar, tous les travailleurs et tous les employeurs seront traités de la même façon. La totalité de la rémunération, à partir du premier dollar, sera assurable comme jamais auparavant, à concurrence du MRA. Il n'y aura plus de minimum ou de maximum hebdomadaire pour déterminer la rémunération assurable.

Une autre faille du système actuel est que, à défaut d'une réserve, en période de récession, les cotisations augmentent pour combler le déficit croissant de la caisse de l'assurance-chômage. L'augmentation des cotisations est pour les entreprises un fardeau qui arrive au pire moment. Elle conduit à l'accélération des licenciements. En outre, le gouvernement est obligé d'augmenter les impôts ou d'emprunter pour compenser le manque à gagner. L'objectif du régime d'assurance-emploi est de résoudre ce dilemme en constituant une réserve importante dans le Compte d'assurance-chômage. Cela aidera à stabiliser le taux des cotisations et à garantir des fonds suffisants pour payer les prestations. En période d'expansion économique on constituera une réserve dans le Compte d'assurance-chômage et, le cas échéant, en période de récession on puisera dans la caisse.

(1640)

L'objectif d'une réserve dans le Compte d'assurance-emploi est d'assurer une plus grande stabilité des taux de cotisation. La dernière récession a montré pourquoi une telle réserve était nécessaire. Le taux de cotisation a augmenté de plus de 33 p. 100, passant de 2,25 $ en 1991 à 3,07 $ en 1994. Cela représente une augmentation des charges sociales dont on estime qu'elle a coûté 200 000 emplois à notre économie.

[Français]

Étant originaire de Terre-Neuve, je comprends très bien la préoccupation des travailleurs des industries saisonnières. Parce qu'il sera basé sur les heures travaillées, le système d'assurance- emploi sera plus équitable pour ces hommes et ces femmes qui gagnent durement leur salaire. Un plus grand nombre d'entre eux deviendront admissibles à des prestations. En effet, environ 45 000 travailleurs des industries saisonnières, qui aujourd'hui n'ont pas d'emploi et ne sont pas admissibles à l'assurance- chômage, auront droit à des prestations d'assurance-emploi.

[Traduction]

En outre, certains seront admissibles plus tôt parce qu'ils sont portés à effectuer un plus grand nombre d'heures de travail et bon nombre toucheront des prestations plus longtemps. Encore une fois, c'est grâce à la substitution du calcul des heures à celui des semaines, celui-ci n'ayant jamais été bénéfique pour la plupart des industries saisonnières.

La protection assurée par l'assurance-emploi s'appliquera à un plus grand nombre de personnes travaillant à temps partiel ou ayant plusieurs emplois. C'est ainsi que 500 000 travailleurs à temps partiel de plus verront leur travail assuré, et ce, pour la première fois. Cela mérite d'être répété, honorables sénateurs. Un demi-million de travailleurs dont le travail n'avait encore jamais été assuré seront désormais protégés dans le cadre de ce programme, parce que toutes les heures de travail comptent. Les travailleurs à temps partiel seront davantage incités à accumuler le nombre d'heures nécessaire pour avoir droit aux prestations.

Pour ce qui est de l'incidence de l'assurance-emploi sur les femmes, 270 000 d'entre elles qui travaillent à temps partiel verront leur travail assuré pour la première fois. Sans que l'on touche au nombre d'heures de travail prescrit, 36 000 femmes auront droit aux prestations d'assurance-emploi, surtout en raison de l'élimination du plafonnement voilé des 15 heures. On estime qu'au plus 4 000 des 195 000 personnes qui touchent actuellement des prestations de maternité devront travailler plus longtemps pour être admissibles à ces prestations spéciales. Qui plus est, le système fondé sur les heures permettra à un plus grand nombre de femmes travaillant à temps partiel ou occupant plusieurs emplois d'être admissibles aux prestations de maternité et, à mes yeux, c'est là un aspect qui, au cours de tout ce débat, a été passé sous silence ou, à tout le moins, n'a pas été estimé à sa juste valeur.

Les femmes sont encore désavantagées au Canada. Elles touchent des salaires inférieurs à ceux des hommes, et il leur est plus difficile d'avancer dans la carrière. Telle est la réalité au Canada d'aujourd'hui. Le fait est qu'un plus grand nombre de femmes profiteront de ce programme. Elles verront également augmenter leurs possibilités d'acquérir des compétences qui leur permettront d'éliminer le plafonnement voilé les empêchant de progresser. Je suis d'avis que la Chambre et notre comité devraient examiner tout particulièrement l'incidence de cette mesure législative sur les femmes.

L'assurance-emploi ne modifiera que très légèrement les cotisations que doivent payer les étudiants. Étant donné qu'un bon nombre d'entre eux travaillent à temps partiel, ils tireront parti du système fondé sur les heures et, étant donné que toutes les heures comptent, les employeurs ne pourront plus éviter d'avoir à payer des cotisations en limitant le nombre d'heures effectuées par un employé. L'assurance-emploi accorde la même protection à tous les travailleurs, y compris aux étudiants, et à ceux qui doivent occuper plusieurs emplois. Les cotisations seront remboursées à environ 625 000 jeunes. Ils représentent 49 p. 100 de toutes les personnes qui ont droit à des remboursements. Sur le total des jeunes gens qui recevront des remboursements, 400 000 seront des étudiants à plein temps. Les étudiants forment un autre groupe de gens que favorisera cette mesure législative. Plus d'étudiants que jamais seront admissibles et pourront recevoir de l'assurance-emploi, à une période où ils ont besoin de toute l'aide qu'ils peuvent recevoir.

Pour ce qui est des gens d'affaires, ces hommes et ces femmes qui créent les emplois dans notre économie, l'assurance-emploi sera plus facile à administrer et moins coûteuse à gérer. Un taux de cotisation moins élevé et un maximum de rémunération assurable plus bas entraîneront de réelles économies pour les entreprises et stimuleront la création d'emplois.

Selon les prévisions, une fois l'assurance-emploi pleinement mise en oeuvre, les employeurs épargneront plus de 150 millions de dollars par année en frais administratifs seulement. Cela va réduire le fardeau administratif des petites entreprises, supprimer une bonne partie des dossiers qu'elles devaient tenir auparavant, et leur laisser les coudées franches pour réaliser des profits, ce qu'elles devraient faire.

Honorables sénateurs, le programme d'assurance-emploi comprendra un processus permanent de rétroaction et d'ajustement. En fait, le gouvernement fédéral va surveiller étroitement les répercussions des nouvelles mesures sur les gens, les employeurs et les collectivités. Il va évaluer le rendement de l'économie et les marchés de l'emploi, ainsi que les façons dont les travailleurs, les employeurs, les industries et les collectivités s'adaptent au nouveau système. On va procéder à une étude en profondeur pour voir comment près d'une douzaine de collectivités du pays s'adaptent au nouveau système. Ces collectivités représenteront divers types de marchés du travail: les centres urbains, les petites villes, les régions rurales et les économies saisonnières.

De plus, à compter de 1997, la Commission de l'assurance-emploi fournira un rapport annuel au ministre sur la façon dont les particuliers, les collectivités et l'économie s'adaptent au nouveau système. On verra également jusque dans quelle mesure les programmes gouvernementaux fonctionnent bien. Il ne s'agira pas d'un processus à sens unique. Je pense que je peux dire également que le comité sénatorial des affaires sociales procédera à son propre examen indépendant sur la façon dont le nouveau système fonctionne.

Il est important de noter qu'il faut encourager et aider les travailleurs à prendre les emplois disponibles et, pour veiller à ce que les employeurs acceptent une plus large responsabilité dans l'offre d'emploi, on va surveiller la réaction aux modifications des prestataires et des sociétés.

Dans le cadre du programme d'assurance-emploi, on tolérera difficilement ceux qui fraudent délibérément le système. Il est important de comprendre que lorsque nous parlons d'activités frauduleuses, il est question de mesures prises délibérément pour obtenir des prestations auxquelles on n'a pas droit. Il y aura des règles d'admissibilité plus strictes pour les prestataires qui ont fraudé le système, on imposera des sanctions financières accrues aux employeurs coupables de fraude et, de plus, les administrateurs pourront être tenus personnellement responsables des pénalités lorsqu'ils n'agissent pas avec la diligence voulue.

Honorables sénateurs, voilà en substance les nouvelles prestations du revenu. Je le répète, l'assurance-emploi est un système favorable à l'emploi.

Permettez-moi de donner un aperçu de la partie II du projet de loi, les prestations d'emploi actives. Nous savons tous que la transformation structurelle de notre économie a de graves répercussions sur le marché du travail. Trop de gens ont du mal à s'adapter à une réorganisation continuelle. Il en découle que ces gens perdent leur emploi et n'en trouvent pas de nouveaux, car les exigences du marché du travail changent constamment.

[Français]

Le deuxième volet de l'assurance-emploi offrira une aide directe aux gens pour faciliter leur retour au travail. Après avoir amplement étudié la question, le gouvernement a opté pour cinq prestations d'emploi, d'où une grande flexibilité, qui permettront de répondre aux besoins particuliers des travailleurs en chômage grâce à des plans de réemploi spécialement adaptés à leur situation.

[Traduction]

Le gouvernement fédéral discute avec les gouvernements provinciaux de nouveaux accords sur les mesures actives d'emploi qui élimineront les chevauchements et les dédoublements et clarifieront les rôles et les responsabilités. Ce qui est important, bien entendu, ce sont les résultats. Il s'agit de redonner du travail aux Canadiens rapidement. On adaptera les nouvelles dispositions à la situation locale et aux besoins locaux.

On croit que grâce à cette façon de procéder, basée sur le partenariat avec les provinces, on pourra s'assurer que chaque dollar est dépensé en fonction des priorités locales sur le marché du travail. Nous pensons qu'on pourra ainsi, de façon rentable, aider nos clients à accroître leur employabilité.

(1650)

Le gouvernement s'est engagé à réinvestir dans des mesures d'emploi actives 800 millions de dollars économisés grâce au régime d'assurance-emploi. Lorsqu'on ajoute cela au 1,9 milliard de dollars actuellement affecté aux services d'emploi, on constate que le gouvernement investira en tout 2,7 milliards pour aider les prestataires à réintégrer le marché du travail. Ce chiffre comprend 500 millions de dollars en droits à des prestations d'assurance-emploi.

Les cinq prestations d'emploi actives sont éprouvées et axées sur les résultats, et elles remplaceront environ 39 programmes actuels. Je voudrais décrire brièvement chacune d'elles.

Premièrement, les subventions salariales ciblées constituent de nouvelles initiatives et, à mon avis, elles n'ont pas encore fait l'objet de discussions suffisantes dans le débat sur cette question. Ces subventions salariales encourageront l'embauche et offriront une expérience en milieu de travail. Cette mesure vise les prestataires qui risquent d'être constamment au chômage ou qui doivent affronter des obstacles à l'emploi. Ils pourront demander une subvention salariale à un employeur, qui leur offrira un poste menant à un emploi à long terme ou à un autre emploi ailleurs. L'expérience montre que les subventions salariales permettent aux prestataires d'être admissibles à des prestations en fonction de 13 semaines de travail de plus ou d'une rémunération de 5 000 $ de plus par année en moyenne. Le placement des travailleurs et les résultats seront surveillés étroitement.

Deuxièmement, les suppléments de revenu encourageront les prestataires à accepter les emplois disponibles. Ils recevront une aide financière temporaire pendant qu'ils réintègrent le marché du travail et se réadaptent. Dans des programmes analogues en vigueur au Nouveau-Brunswick et en Colombie-Britannique, les participants gagnent 3 000 $ à 5 000 $ de plus que s'ils touchaient des prestations de revenu. Les suppléments de revenu aideront les gens à passer de la dépendance à l'indépendance.

Troisièmement, l'aide au travail indépendant permettra aux travailleurs au chômage de devenir entrepreneurs et, par la même occasion, de créer également des emplois pour d'autres personnes. L'expérience montre que ces gens touchent 142 $ de plus par semaine que ceux qui ne participent pas à cette mesure, demandent 92 p. 100 de moins de prestations d'assurance que les travailleurs comparables et ont 30 p. 100 moins de chances d'avoir besoin d'une aide sociale.

Quatrièmement, les partenariats pour la création d'emplois exigeront une étroite collaboration entre les provinces, les entreprises et les communautés locales. Ils permettront aux chômeurs de toucher un revenu tout en préservant et en perfectionnant leurs habilités et en acquérant une précieuse expérience de travail. Non seulement cette prestation d'emploi active améliore les possibilités futures du chômeur de décrocher un emploi, mais elle encourage une solide croissance de l'économie et la création d'emplois durables.

Cinquièmement, une formation, des prêts et des subventions seront offerts aux prestataires d'assurance-emploi sur demande. Grâce à cette prestation d'emploi active, les chômeurs pourront se perfectionner, mais ce sera leur choix et leur responsabilité, et non l'initiative du gouvernement.

Honorables sénateurs, voilà pour les cinq prestations d'emploi actives.

En outre, un fonds de transition de 300 millions de dollars aidera à créer des milliers d'emplois additionnels dans les régions où le taux de chômage est élevé. Encore une fois, ce fonds de transition est seulement destiné aux régions où le taux de chômage est élevé et vise à garantir qu'elles ne soient pas défavorisées par rapport au reste du pays.

Honorables sénateurs, la première priorité du gouvernement consiste à créer des emplois pour les Canadiens. Les dispositions du projet de loi C-12 doivent permettre au gouvernement de mener à terme sa stratégie en matière d'emploi et d'autres initiatives qui s'y rattachent. Elles sont conçues afin de réaliser des partenariats entre les provinces et le secteur privé. L'objectif de tout cela est de stimuler la croissance économique et la création d'emplois durables. Le gouvernement donne aux Canadiens un système d'assurance équitable, équilibré et moderne, qui fournira un revenu provisoire à ceux qui en auront besoin. Grâce aux prestations d'emploi actives, les chômeurs recevront l'aide dont ils auront besoin pour réintégrer au plus tôt le marché du travail.

[Français]

Le gouvernement offre aux Canadiens et aux Canadiennes un système d'assurance équitable, bien équilibré et moderne qui apportera une aide temporaire, sous forme de soutien du revenu à ceux et celles qui en ont vraiment besoin et qui, grâce aux mesures d'emploi actives, fournira aux travailleurs en chômage l'aide dont ils ont besoin pour retourner le plus rapidement possible sur le marché du travail.

(Sur la motion du sénateur Berntson, au nom du sénateur Murray, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Projet de loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Phillippe Dean Gigantès propose: Que le projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, soit lu une deuxième fois.

-Honorables sénateurs, c'est pour moi un plaisir de présenter aujourd'hui le projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur.

Honorables sénateurs, cette mesure législative fait date. Elle nous donne l'occasion de mettre en oeuvre le premier accord global sur le commerce intérieur à être signé au Canada depuis l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867.

Dans les 129 années qui se sont écoulées depuis 1867, l'économie canadienne s'est développée et a évolué d'une manière que les Pères de la Confédération n'avaient jamais imaginée. La Constitution donne toujours au gouvernement fédéral compétence sur le commerce interprovincial. Avec le temps, les provinces en sont venues à jouer des rôles de premier plan pour influencer la croissance économique et la réglementation du commerce à leur niveau. Ainsi, les ententes et les règlements commerciaux sont apparus au gré des besoins, trop souvent pour répondre aux besoins régionaux sans tenir compte des effets sur l'économie nationale.

Honorables sénateurs, beaucoup de ces mesures ont créé des obstacles au commerce qui ont gravement entravé la libre circulation des produits, des services, des personnes et des capitaux à l'intérieur du Canada. De tels obstacles peuvent mener à l'utilisation inefficace des ressources et limiter la capacité de l'industrie de tirer parti des économies d'échelle et de soutenir la concurrence sur les marchés. Cela a souvent eu pour effet de réduire la compétitivité de nos entreprises et de nuire à l'économie canadienne.

Les exemples de ces obstacles sont nombreux: les différences dans les normes professionnelles provinciales limitent la mobilité de la main-d'oeuvre entre les provinces. Par leurs politiques sélectives d'inscription au catalogue, certaines régies des alcools exercent une discrimination envers les produits de l'extérieur de leur province, ce que je constate lorsque je cherche une marque de bière particulière. La réglementation des transports, les codes de sécurité, les modalités d'inspection et les normes sur les véhicules qui varient d'une province à l'autre créent des entraves au camionnage interprovincial.

[Français]

Honorables sénateurs, des règlements différents sur les transports - le code de la sécurité routière, les modalités relatives aux inspections et les normes sur les véhicules dans chaque province - font que les camionneurs peuvent difficilement aller d'une province à l'autre.

Les politiques gouvernementales en matière d'acquisition qui donnent la préférence aux entreprises locales ont nui au commerce interprovincial. Les procédures dans le domaine de la construction varient d'un secteur de compétence à l'autre. Elles sont aussi une barrière.

Ces mesures figurent parmi les exemples les plus courants d'obstacles ou d'entraves au commerce interprovincial qui aient existé et continuent d'exister au Canada. Nous nous retrouvons donc avec un ensemble de règlements et de normes disparates et d'autres obstacles au commerce interprovincial qui se sont érigés dans notre entourage.

À mesure que le monde changeait autour de nous et que notre économie et que nos intérêts économiques évoluaient, la situation ainsi créée sur le marché intérieur canadien devenait de plus en plus inacceptable. La crainte que ces obstacles et ces entraves au commerce portent gravement atteinte à la capacité du Canada de demeurer concurrentiel dans l'environnement commercial ne cesse de croître.

C'est pourquoi il est urgent que nous établissions un nouveau régime commercial au Canada, fondé sur un commerce interprovincial plus ouvert, un régime qui n'entrave pas la circulation des personnes et des investissements sur le territoire national, et qui prévoit des approches de coopération pour le règlement des différends commerciaux internes.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le projet de loi C-19 nous donne l'occasion de veiller à ce que le gouvernement fédéral puisse jouer son rôle dans l'abolition des obstacles au commerce interprovincial. La mesure législative accorde au gouvernement le pouvoir dont il a besoin pour assumer les obligations qu'il a acceptées aux termes de l'Accord sur le commerce intérieur, accord que les premiers ministres ont signé en juillet 1994 et qui est entré en vigueur le 1er juillet de l'an dernier.

L'Accord sur le commerce intérieur définit le cadre qui permettra de progresser vers une élimination des barrières au commerce interprovincial des produits et des services, de faciliter la mobilité interprovinciale des travailleurs et des capitaux d'investissement et de mettre en place un mécanisme non judiciaire de règlement des différends commerciaux. Le processus qui a conduit à cet accord et à ce projet de loi a été très long. Il a exigé la collaboration de nombreuses personnes et l'étude d'un grand nombre de questions et de points de vue. Y ont participé non seulement des ministres et fonctionnaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, mais aussi des représentants du secteur privé.

Les représentants du secteur privé, en particulier des intérêts commerciaux, ont continuellement fait pression sur tous les paliers de gouvernement pour exiger une solution aux problèmes que représentent les barrières au commerce interprovincial et les coûts économiques qui en découlent pour le Canada. Ils continuent d'ailleurs d'exercer des pressions. L'Association des manufacturiers canadiens, par exemple, a calculé que les obstacles au commerce dans notre marché intérieur coûtent à l'économie canadienne 1 p. 100 du produit intérieur brut, soit plus de 7 milliards de dollars par année, en pertes d'emploi et de revenu.

Il a fallu un processus long et approfondi pour identifier les questions qui posent problème et élaborer des solutions pratiques et applicables. Ce processus s'est notamment caractérisé par l'esprit de coopération dont ont fait preuve toutes les parties intéressées. L'Accord sur le commerce intérieur constitue un exemple remarquable de ce qu'on peut accomplir dans un esprit de coopération au Canada.

Il est également important de noter que les partis politiques de toutes tendances et représentatifs de toutes les perspectives régionales ont participé au processus. Toutes les parties au processus de négociation se sont entendues sur un point fondamental en reconnaissant qu'un environnement commercial plus ouvert sera bénéfique pour le Canada. Le processus a été long, mais il a été caractérisé par l'esprit de coopération et un sentiment de mission commune. L'accord représente un pas important vers la réalisation de notre objectif commun, à savoir améliorer l'environnement commercial intérieur et éliminer les obstacles au commerce, aux investissements et à la mobilité des travailleurs au Canada.

[Français]

Honorables sénateurs, l'Accord prévoit différents éléments: un système fondé sur des règles pour régir le commerce au Canada; la suspension de nouveaux obstacles; un engagement à mener des négociations dans le but d'élargir et de renforcer l'Accord; un code de conduite visant à empêcher une concurrence néfaste pour l'investissement; un accroissement de la mobilité de la main-d'oeuvre; un engagement visant à harmoniser les mesures normatives; un système conçu au Canada pour le règlement des différends qui favorise la conformité grâce à la consultation et à la coopération au lieu de procédures plus officielles faisant appel aux tribunaux. Ce sont là des réalisations très importantes.

La mise en oeuvre globale de l'Accord sur le commerce intérieur est sous la surveillance du comité du commerce intérieur, qui se compose de représentants de niveau ministériel de tous les pouvoirs publics canadiens qui sont parties à l'Accord, soit le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux.

Le comité est appuyé par un secrétariat, établi à Winnipeg, qui assure des services administratifs et opérationnels. L'Accord sur le commerce intérieur est un jalon important pour les Canadiens et les Canadiennes.

Il représente un énorme pas en avant dans l'instauration d'un marché plus ouvert et plus concurrentiel au Canada. Cet Accord jette les bases d'un marché intérieur plus concurrentiel et s'ajoute aux efforts déployés par le premier ministre et les autres premiers ministres qui ont pris part activement à l'approche très fructueuse d'Équipe Canada afin d'ouvrir davantage les marchés d'exportation aux produits et services canadiens.

Avec ce projet de loi, nous mettrons en place les changements législatifs qui s'imposent au niveau fédéral afin de prendre, dans le cadre des compétences fédérales, les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de l'Accord et de poursuivre le processus de changement dont le gouvernement fédéral a été le maître d'oeuvre.

En adoptant le projet de loi, cette Chambre réaffirmera l'engagement du gouvernement fédéral à apporter les changements nécessaires pour créer un nouveau régime commercial au Canada, un régime qui reflète les réalités politiques et économiques d'aujourd'hui.

Lorsque l'Accord sur le commerce intérieur est entré en vigueur le 1er juillet de l'an dernier, tous les gouvernements signataires sont devenus liés par les obligations qu'ils avaient acceptées en le signant.

Chaque gouvernement est tenu de respecter ses obligations et d'assumer les responsabilités qui lui incombent aux termes de l'Accord.

À la conférence annuelle qu'ils ont tenue l'été dernier, les premiers ministres et les dirigeants des territoires ont renouvelé leur engagement à éliminer les obstacles et à mettre l'Accord en oeuvre. Plusieurs provinces ont déjà adopté leur propre loi de mise en oeuvre.

Selon moi, il est important que le gouvernement fédéral examine ce projet de loi avec célérité.

Le gouvernement fédéral a joué un rôle de chef de file en amenant tous les gouvernements à concerter leurs efforts sur les questions concernant le commerce intérieur dans l'intérêt de tous les Canadiens.

Grâce à ce projet de loi, le gouvernement fédéral va continuer à jouer son rôle prépondérant dans le processus intergouvernemental axé sur la coopération. Nous devons agir sans délai.

(Sur la motion du sénateur Berntson, le débat est ajourné)

[Traduction]

Projet de loi sur l'Association canadienne des ex-parlementaires

Adoption du rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (Projet de loi C-275, Loi constituant l'Association canadienne des ex-parlementaires, avec cinq propositions d'amendement), présenté plus tôt aujourd'hui au Sénat.

L'honorable Sharon Carstairs propose: Que le rapport soit adopté.

-Honorables sénateurs, je voudrais examiner brièvement avec vous les amendements que le comité a apportés aujourd'hui au projet de loi. Des exemplaires du rapport vous ont été distribués.

En résumé, les quatre premiers amendements qui figurent à la première page du sixième rapport ne visent qu'à modifier la terminologie employée. On a fait une grave erreur à l'autre endroit. On a parlé de «senators and members of Parliament», alors qu'il aurait fallu dire «senators and Members of the House of Commons». Nous avons corrigé en conséquence les versions anglaise et française du projet de loi. Voilà pour les quatre premiers amendements.

Le cinquième amendement est beaucoup plus significatif. L'alinéa que nous avons supprimé se lit comme ceci:

employer, dans le cadre de sa mission, les crédits qui peuvent lui être affectés par le Parlement ou tout autre gouvernement pour ses activités;

Le comité n'a pas voulu qu'on ait l'impression que cette Association canadienne des ex-parlementaires pouvait compter sur des fonds gouvernementaux. Pour que ce soit bien clair, il a supprimé l'alinéa h) et a renommé les autres en conséquences.

(1710)

L'honorable Eymard G. Corbin: Puis-je poser une question au sénateur Carstairs?

Le sénateur Carstairs: Certainement.

Le sénateur Corbin: Des témoins ont-ils comparu devant le comité?

Le sénateur Carstairs: Oui, des témoins ont comparu, dont trois greffiers de la Chambre des communes.

Le sénateur Corbin: Je n'ai pas étudié la question dans ses moindres détails, mais je me demande pourquoi ce groupe souhaite ce qui m'apparaît n'être rien d'autre qu'une constitution en corporation en vertu des lois du Canada, alors que tout groupe ou particulier au Canada dispose d'une autre solution, soit la constitution en vertu de la Loi sur les compagnies.

Le sénateur Carstairs: Nous avons abordé cette question au sein du comité. Comme il s'agit d'ex-parlementaires, les ex-députés et ex-sénateurs souhaitaient que leur association soit constituée au sein de l'institution où ils exerçaient leurs fonctions.

Le sénateur Corbin: Ce projet de loi confère-t-il aux ex-parlementaires des droits ou privilèges exclusifs aux députés ou aux sénateurs?

Le sénateur Carstairs: Non, il n'aura pas cet effet. Nous avons supprimé l'alinéa h) parce que nous ne voulions pas donner l'impression que ce pourrait être le cas.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Nous avons aussi exclus l'alinéa h) parce qu'il permettait à l'association de recevoir des crédits du Parlement, du gouvernement ou de gouvernements. Personnellement, j'étais d'avis que cela pourrait permettre à des membres de cette association de faire ce que font certaines associations d'amitié, c'est-à-dire accepter de bénéficier d'un traitement privilégié offert par un gouvernement étranger qui les invite sur son territoire dans l'espoir qu'elles intercèdent en son nom. Si on accepte cela et qu'au retour on ne fait rien pour donner satisfaction à l'autre gouvernement, on l'a volé. Si, par contre, on fait quelque chose pour lui donner satisfaction, il nous a achetés. C'est un aspect du projet de loi qui était particulièrement discutable. Je suis heureux qu'il ait été supprimé.

Je continue de penser que c'est une mesure législative inutile et bâclée, mais comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne m'y opposerai pas.

L'honorable John B. Stewart: Je voudrais poser une question au sénateur. Le comité a-t-il entendu des témoignages selon lesquels d'autres parlements, comme ceux de la Grande- Bretagne, de la France ou de l'Australie, ont une constitution semblable?

Le sénateur Carstairs: Nous n'avons obtenu aucun renseignement de ce genre et, à vrai dire, nous n'en avons pas demandé.

Son Honneur le Président: Madame le sénateur Carstairs, appuyée par madame le sénateur Pearson, propose que le rapport soit adopté. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Le sénateur Gigantès: Avec dissidence.

(La motion est adoptée, avec dissidence, et le rapport est adopté.)

Troisième lecture

Son Honneur le Président: Quand ce projet de loi ainsi modifié sera-t-il lu une troisième fois?

L'honorable Sharon Carstairs: Avec la permission du Sénat, maintenant, honorables sénateurs.

Son Honneur le Président: Accordez-vous la permission, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Madame le sénateur Carstairs, appuyée par madame le sénateur Pearson, propose que le projet de loi modifié soit lu une troisième fois maintenant. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée, avec dissidence, et le projet de loi est lu une troisième fois et adopté.)

[Français]

Projet de loi d'intérêt privé

La compagnie du chemin de fer de Nipissing à la Baie de James-Projet de loi portant dissolution-Troisième lecture

L'honorable Lise Bacon propose la troisième lecture du projet de loi S-7, Loi portant dissolution de la Compagnie du chemin de fer de Nipissing à la Baie de James.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

[Traduction]

Langues officielles

Adoption du premier rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du premier rapport du comité mixte permanent des langues officielles (Conseil privé, crédit 25 du budget pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997), présenté au Sénat le 15 mai 1996.

L'honorable Jean-Louis Roux propose l'adoption du rapport.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Agriculture et forêts

Motion portant autorisation au comité d'étudier l'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts du Canada-Ajournement du débat

L'honorable Noël A. Kinsella, au nom de l'honorable Mira Spivak, conformément à l'avis donné le 15 mai 1996, propose:

Que le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à étudier l'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts au Canada; et

Que le comité présente son rapport au plus tard le 31 mars 1997.

-Honorables sénateurs, il y a maintenant plusieurs années que le Sénat, par l'intermédiaire de ses comités, n'accorde pas beaucoup d'attention au secteur forestier, secteur dont les exportations dépassent en valeur celles des secteurs de l'énergie, des pêches, des mines et de l'agriculture combinés.

Le secteur forestier emploie directement ou indirectement plus de trois quarts de million de Canadiens. En raison des pressions internationales, de la mise au point de nouveaux produits et de nouvelles techniques et des préoccupations liées à l'environnement, ce secteur a subi de profonds changements.

Le gouvernement fédéral contribue à déterminer si les méthodes d'exploitation forestière canadiennes sont durables. Il lui est utile de savoir si, dans l'avenir, les Canadiens auront toujours des emplois en foresterie ou si, comme nous l'observons depuis quelques années, le nombre de ces emplois continuera de diminuer.

Les membres du comité de ce côté-ci du Sénat croient qu'il est temps de se pencher sur quelques questions clés dans le domaine de la foresterie, comme un comité de la Chambre des communes l'a fait il y a deux ans. D'autres membres du comité partagent notre point de vue et c'est pourquoi je suis heureux de proposer que le mandat du comité soit élargi pour inclure une enquête sur l'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts au Canada.

(Sur la motion du sénateur Taylor, le débat est ajourné.)

Pêches

Autorisation au comité d'étudier des question liées à son mandat

L'honorable Noël A. Kinsella, au nom de l'honorable sénateur Gerald J. Comeau, conformément à l'avis du 15 mai 1996, propose:

Que le comité sénatorial permanent des pêches, conformément à l'aliéna 86(1)o), soit autorisé à étudier toutes questions concernant les pêches et les océans canadiens qui pourraient lui être soumises occasionnel-lement, en général au Canada; et,

Que le comité présente son rapport final au Sénat au plus tard, le 31 mars 1997.

(1720)

-Honorables sénateurs, en parlant sur cette motion, je crois savoir que les membres du comité ont réfléchi là-dessus. J'estime que cette question revêt une grande importance pour le Canada, non seulement pour les régions bordées par nos grands océans, mais pour le pays tout entier. Je crois que les propositions du comité devraient être approuvées par le Sénat.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Affaires sociales, sciences et technologie

Projet de loi sur l'assurance-emploi-Autorisation au comité de voyager au cours de son étude-Ajournement du débat

L'honorable Jean-Maurice Simard, conformément à son avis de motion du mercredi, 15 mai 1996, propose:

Qu'une instruction soit donnée au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie pour qu'il s'ajourne de temps à autre et d'une ville à l'autre lorsqu'il entreprendra son étude du projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada.

Honorables sénateurs, j'aimerais vous entretenir au cours des 10 prochaines minutes de la nécessité d'une étude exhaustive du projet de loi C-12 par le comité des affaires sociales et de la technologie.

Le parrain de ce projet de loi nous disait, il y a quelques instants, que les membres du comité devront approfondir et éclaircir les nombreux articles contenus dans ce projet de loi et se documenter sur eux.

Ce n'est pas mon intention aujourd'hui de parler sur le fond de ce projet de loi. J'aimerais pouvoir convaincre les sénateurs libéraux et les sénateurs indépendants. Je peux vous assurer que les honorables sénateurs de ce côté de la Chambre appuient mon initiative et ma motion pour faire en sorte que le comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie puisse voyager d'un bout à l'autre du Canada.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je prends la parole sur une question qui préoccupe profondément mes collègues et moi-même, et qui, je crois devrait préoccuper tous les sénateurs, en l'occurrence le refus d'autoriser le comité qui étudie le projet de loi C-12, sur l'assurance-emploi, à voyager au Canada.

Le comité a reçu la tâche et la responsabilité de faire une étude adéquate de ce projet de loi qui touchera des centaines de milliers de travailleurs et de chômeurs canadiens. Les sénateurs des deux côtés de cette Chambre doivent aux Canadiens d'effectuer un examen critique approfondi de cette mesure législative. Pour pouvoir s'acquitter de cette tâche importante, il est essentiel que le comité soit autorisé à voyager pour qu'il puisse entendre les Canadiens des régions qui seront le plus touchées par le projet de loi C-12.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-12 ne vise pas simplement à apporter quelques modifications de forme à une loi existante du Parlement. Il vise à remplacer une loi importante, la Loi sur l'assurance-chômage, par une autre loi importante, la Loi sur l'assurance-emploi.

Le programme que cette mesure législative cherche à réformer est la deuxième dépense du gouvernement fédéral du point de vue du montant qu'elle représente. Jusqu'à maintenant dans le processus législatif, il n'est pas clair que le gouvernement a reconnu toutes les ramifications du projet de loi C-12.

Je suis certain que nous sommes tous d'accord pour dire que le projet de loi C-12 aura de lourdes conséquences, particulièrement au Nouveau-Brunswick, dans les autres provinces de l'Atlantique et dans certaines régions du Québec, dont les économies sont fondées sur l'emploi saisonnier. Afin de pouvoir bien évaluer les effets de cette mesure, il est absolument essentiel que nous puissions entendre le point de vue des Canadiens et des groupes de Canadiens qui risquent d'être le plus touchés. Le moyen le plus efficace et efficient de faire cela est d'autoriser le comité qui étudie le projet de loi C-12 à se rendre dans les régions pour donner aux gens d'un bout à l'autre du Canada la chance de se faire entendre.

Je suis certain que peu d'entre eux ont le temps ou les moyens de venir à Ottawa. On sait aussi, et c'est malheureux, qu'un certain nombre de groupes se sont vu refuser une audience devant le comité à l'autre endroit.

J'ai ici, honorables sénateurs, un article du Telegraph Journal, du Nouveau-Brunswick, dans lequel on cite en partie une déclaration du maire de Doaktown, James Porter. Voici un extrait de cet article:

«Qu'arrivera-t-il ici?», demande M. Porter. «Il y a probablement 80 p. 100 des gens qui travaillent ici qui sont des travailleurs saisonniers.

«Je n'ose même pas dire ce qui pourrait arriver.»

M. Porter dit qu'il est d'accord pour qu'on élimine les abus du régime d'assurance-chômage, mais qu'il ne comprend pas pourquoi on pénaliserait les gens qui n'ont pas le choix.

«S'il n'y a pas de travail en janvier, en février, en mars et en avril, alors il n'y a pas de travail», dit-il.

Elmer Oickle possède une station-service Petro-Canada et un dépanneur à Doaktown. Il emploie neuf personnes. Il pense que les changements le forceront à mettre trois personnes à pied presque immédiatement.

«Cela me fait peur, car j'ai beaucoup investi dans mon commerce», de dire M. Oickle.

L'article dit ensuite ceci:

C'est ce qui inquiète M. Porter. Il dit que le fait d'enlever de l'argent aux travailleurs saisonniers pourrait entraîner la disparition de ce village.

Tout cela pour dire que nous devons entendre ce que M. Porter et d'autres groupes ont à dire. Nous n'avons pas besoin d'entendre seulement les syndicats et les grandes sociétés; nous avons besoin d'entendre les gens ordinaires dans leurs villages. Je ne veux pas refaire ce que le comité dirigé par le sénateur Hébert a fait en 1989. À ce moment-là, un comité spécial avait été formé pour examiner une version antérieure de la réforme de l'assurance-chômage. En fait, les libéraux, qui étaient dans l'opposition, avaient pris un an et demi.

Le sénateur Kinsella: Avaient-ils voyagé?

(1730)

Le sénateur Simard: Oui, et je faisais partie du groupe.

Nous voulions donner aux Canadiens une indication ou une preuve supplémentaire, si c'était nécessaire, que le Parlement était sérieux. Le Parlement avait eu l'occasion d'examiner la mesure législative et d'entendre le point de vue de différentes personnes.

Je ne dis pas que ce comité a besoin de beaucoup voyager ou pendant longtemps. Il pourrait terminer ses audiences beaucoup plus rapidement que le comité précédent dont j'ai parlé.

Je voudrais assurer à cette Chambre que l'intention de mes collègues de ce côté de la Chambre n'est pas de retarder le processus législatif ni de lui faire obstacle pour des raisons politiques.

Honorables sénateurs, vous vous souviendrez que le comité sénatorial spécial - que j'ai mentionné plus tôt, rafraîchissant ainsi la mémoire de certains - portait sur le projet de loi C-21, une initiative d'assurance-chômage du gouvernement précédent. Il avait été formé en 1989, sous la présidence de l'honorable sénateur Hébert. Il a tenu des audiences à Ottawa et dans d'autres parties du Canada à un coût, je dois le dire, de presque 80 000 $ avant le dépôt de son rapport final, en février 1990.

Pour revenir au projet de loi, les réformes qui sont proposées à l'assurance-chômage ne sont pas moins importantes. Cette mesure est très complexe. Je voudrais entendre - peut-être au Nouveau-Brunswick, mais pas à Ottawa - le ministre provincial du Travail qui, lorsqu'il était dans la fonction publique fédérale, a tenté pendant 10 à 12 ans d'administrer la loi actuelle. Je voudrais entendre ses observations sur ce projet de loi, qu'on dit une mesure facile et une meure de forme.

Ce projet de loi est très complexe. Il prévoit les dispositions nécessaires pour éliminer les abus et nous sommes tous en faveur de cela. Toutefois, il va beaucoup plus loin que la réforme prévue dans le projet de loi C-21 de 1989. Je voudrais entendre le ministre, entre autres. Il serait peut-être bon d'entendre les observations venant du gouvernement de la Nouvelle-Écosse, mais pas à Ottawa, pas par vidéo, comme on l'a fait à la Chambre des communes. Il serait logique que nous puissions rencontrer directement des témoins et leur parler, sans recourir à la technique vidéo, par exemple.

Ce projet de loi est nécessaire, mais il est incomplet, imparfait. S'il peut être mis en oeuvre sans que le gouvernement s'engage à rembourser une partie des 5 milliards de dollars d'économies qu'il prévoit de réaliser l'an prochain et qui pourraient doubler et atteindre 10 milliards de dollars en 1998, nous devrions peut-être entendre les suggestions des contribuables, des gens d'affaires et des travailleurs saisonniers, dont bon nombre seront laissés en plan par M. Young.

Honorables sénateurs, Doug Young semble heureux d'avoir réglé le problème de 90 p. 100 des travailleurs saisonniers. Si 10 p. 100 des travailleurs saisonniers du Nouveau-Brunswick sont laissés en plan, cela veut dire 10 000 personnes. Nous devrions entendre certaines d'entre elles, pas les dirigeants syndicaux, pas les gros canons, pas les représentants de M. White et du Congrès du Travail du Canada. Nous devrions entendre les travailleurs et les familles qui seront visés par le projet de loi. Voilà pourquoi je propose qu'on enjoigne au comité de se déplacer.

Je pense que le projet de loi C-12 devrait être traité comme l'a été le projet de loi C-21 en 1989. Il devrait être examiné aussi attentivement et sérieusement.

Cela m'amène à une autre question qui, je l'espère, n'a pas été un facteur dans la décision de refuser au comité le droit de se déplacer. Cette décision découle de la stricte contrainte de temps qui semble avoir été imposée à l'adoption de ce projet de loi. Le projet de loi C-12 renferme un certain nombre de dispositions capitales, comme les périodes de calcul du taux qui doivent prendre effet dans tout juste quelques semaines, soit les 30 juin et 1er juillet 1996.

Si je puis convaincre assez de sénateurs ministériels, ainsi que certains de mes collègues, à se joindre à moi, nous dirons au gouvernement que le 1er juillet n'est pas une date magique. Pourquoi ne pas choisir le 1er août ou le 1er septembre? C'est une date limite imaginaire. C'est une date limite apparente. Toutefois, compte tenu de cette date limite, j'ai demandé à maintes reprises au gouvernement de faire une étude préliminaire du projet de loi, une demande qui a été chaque fois rejetée. Nous aurions pu commencer l'étude du projet de loi il y a deux mois.

J'en appelle aux sénateurs libéraux et à ceux de la région de l'Atlantique et du Québec pour qu'ils réfléchissent sérieusement à cette question durant le week-end et qu'ils sondent leur conscience et se joignent à nous pour exhorter madame le sénateur DeWare et son comité à se déplacer.

L'observateur non averti peut avoir l'impression que l'on nous demande tout simplement de donner une approbation de pure forme au projet de loi pour qu'il soit adopté rapidement. Honorables sénateurs, si c'était le cas, nous rendrions un bien mauvais service aux Canadiens.

Je dois réitérer ma profonde déception devant la décision de refuser au comité la possibilité de se déplacer pour entendre des témoins sur le projet de loi C-12. Cette décision nie aux Canadiens d'un océan à l'autre la possibilité d'exprimer leur point de vue sur une mesure législative qui les touchera de près. Je prie tous les sénateurs de demander avec moi que cette décision soit revue. En fait, j'exhorte le Sénat à donner instruction au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie de se rendre à différents endroits du Canada lorsqu'il étudiera le projet de loi C-12, Loi sur l'assurance-emploi au Canada.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

Ajournement

Permission ayant été accordé de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit au lundi 27 mai 1996, à 14 heures.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au lundi 27 mai 1996, à 14 heures.)


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